dimanche, 13 octobre 2019 10:59

Les élections fédérales 2019, une perspective patriotique

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Édito du Bonnet des patriotes par Gilles Verrier

La campagne électorale signale-t-elle quelque nouveauté dans l'offre politique ? À vrai dire, très peu. Les principaux partis restent dans leur rôle, courtisent leur "clientèle" et répètent leurs lignes. Ils fuient comme la peste la controverse. Celle qui pourrait leur attirer un sourcillement des "king makers" et une couverture de presse défavorable, voire négative. Comme le disait Coluche, "Si les élections changeaient quelque chose, cela se saurait". La politique du spectacle domine toujours et décourage un vrai examen des grands enjeux. 
Par conséquent, les grands axes de la politique internationale, économique et de défense du Canada continueront d'être alignés sur ceux de l'ONU, des États-Unis, du G7, du FMI, de la Banque mondiale, de l'OTAN, etc. En bon élève, le Canada continuera de réagir aux événements, ce qui soulignera son manque d'indépendance face aux réseaux du mondialisme, que ces derniers soient officiels ou qu'ils agissent derrière la scène. Une importante crise économique n'est pas à écarter au cours du prochain mandat. Le gouvernement tentera de compenser ses effets avec l'accroissement des dépenses publiques, disposant toutefois d'une marge de manoeuvre réduite compte tenu de son niveau d'endettement. C'est là une vulnérabilité pour le pays que les deux principaux partis ne sont pas résolus à contenir. Gouverner n'est donc pas prévoir !

Peu de différences marqueront l'action gouvernementale sur le fond, que les libéraux ou les conservateurs l'emportent. En revanche, un gouvernement minoritaire marquerait l'accroissement des rivalités de tout ordre et leur donnerait plus libre cours. Le résultat serait d'affaiblir l'action gouvernementale et, possiblement, de conduire à sa paralysie. L'insatisfaction face à l'offre politique persiste et elle se traduit par la présence de 21 partis politiques reconnus. Il n'est pas rare que le nombre des candidats dans les circonscriptions urbaines dépasse la dizaine. 

Dans ce décor de marketing dominé par la langue de bois, la seule nouveauté notable sur l'élection précédente de 2015 est l'apparition du Parti populaire. Contrairement à son nom, le parti propose des mesures qui ne sont pas forcément populaires au premier abord. C'est le seul parti d'importance à s'écarter de la langue de bois. D'abord, parce qu'il irrigue d'un peu de bon sens une puérile hystérie climatique. Il est ensuite le seul à proposer le retour à l'équilibre budgétaire en deux ans. Pour y arriver, il se dira même insensible à la pleurniche communautaire, refusant apparemment de saupoudrer à gauche et à droite de l'argent emprunté pour s'acheter de la fidélité électorale. Non sans intérêt, il vante aussi le respect de la constitution et, par conséquent, la fin des empiètements du fédéral dans les champs de compétence des provinces. Même si il y a loin de la coupe aux lèvres, l'intention est du jamais vu chez un fédéraliste depuis fort longtemps...  Maxime Bernier tire encore le tapis sous les pieds du Bloc quand il affirme sans ambages que la Loi 21 relève de la compétence provinciale. 

Si une nouvelle constitution devait être négociée un jour dans l'optique de l'égalité des nations, la rigueur peu commune qu'affiche Bernier sur les principes pourrait faire de lui un interlocuteur de choix, moins biaisé idéologiquement que les Trudeau, père et le fils. Soyons clair, chez Bernier, le manque de sensibilité (ou de compréhension) pour la question nationale apparaît assez nul. Et son ultra-libéralisme en économie (il milite pour mettre fin aux mécanismes de gestion de l'offre), bouscule un interventionnisme d'État que d'aucuns considèrent comme un trait de "l'identité canadienne". À tout considérer, Bernier se distingue comme le candidat le plus droit dans ses bottes. Au débat en français du 10 octobre dernier, il a laissé le Bloc loin derrière au titre de champion d'un franc parler pas trop politiquement correct. Bonus, il se sera valu des sympathies en mettant de l'avant une réduction significative des seuils d'immigration. Ce qui démontre qu'il n'y a pas que le Bloc qui puisse défendre les intérêts du Québec à Ottawa. Rappelons que le Bloc a argumenté contre Bernier, en faveur du maintien de hauts niveaux d'immigration.

Effectivement, le Bloc québécois fait corps avec à une désespérante rectitude politique. On le reconnaît avec sa défense d'une position irresponsable sur l'immigration, ce qui devrait décourager bien de ses électeurs. Bravant toute incohérence, le Bloc se pose toujours, sans rougir, comme le héraut des intérêts nationaux, mais se fait en pratique le champion de l'harmonisation fédéraliste. Avec des positions voisines de celles des élections précédentes, il affiche une compatibilité complète avec le cadre fédéral. De plus, en se refusant à toute initiative en vue de résoudre la question nationale, prétextant que cela n'est pas de son ressort, le Bloc s'excuse d'exister. Autrement dit, il ne sert à rien. Il est en rade en attendant que le vent se lève à Québec. Se contenter d'accompagner la population dans son évolution, est un alibi des plus fessier qui, forcément, le prive de tout leadership. Un alibi qui le pousse dans l'insignifiance eu égard à la question nationale. Avec des ambassadeurs aussi incompétents, peut-on conjecturer pourquoi Maxime Bernier, francophone né au Québec, ne comprend rien à la question nationale ? 

Il y a quelque chose d'un peu atavique dans l'appui au Bloc. L’appui pour ce parti tiendrait largement au fait qu'il est “québécois” et uniquement à ce fait. On peut le déplorer, mais la majorité de ses appuis font peu de cas de ses positions politiques. On serait prêt à pardonner toutes ses incohérences. Ce comportement n’est certes pas très rationnel, mais on peut le comprendre comme une volonté persistante de ralliement national autour d'un icône. Mais c'est aussi une ultime bouée de flottaison qui permet d'échapper, autant que faire se peut, à la vision de l'abîme que nous a laissé l'idéologie péquiste.   

Même si les fondateurs du Bloc jugeaient que son existence devait être temporaire, les salaires, les comptes de dépenses et les retraites dorées sont devenus un incitatif pour user son fond de culotte sur les chaises parlementaires. Pour se perpétuer, le Bloc utilise ses ressources pour améliorer le fédéralisme et vendre une réthorique qui exploite le sentiment national dans son propre intérêt, sans risques.

Même si ses fondateurs du Bloc jugeaient que son son existence devait être temporaire,  les salaires, les comptes de dépenses et les retraites dorées sont devenus un incitatif majeur pour user son fond de culotte sur les chaises parlementaires. Pour se perpétuer, le Bloc utilise ses temps libres pour vendre une réthorique qui exploite le sentiment national dans son intérêt et explique à ceux qui veulent le croire que son action parlementaire est très utile pour le Québec.  
 
Il y avait pourtant un monde avant le Bloc, parti formé en 1991 par des transfuges de partis fédéralistes. Avant la naissance du Bloc, il s'était forgé une pratique de résistance dans certains cercles. Elle prônait l'abstention, l'annulation du bulletin de vote où la dérision, à la manière du parti rhinocéros, fondé en 1963. 


Le retour à une pratique de l'abstention conserve le potentiel d'une vraie dissidence. Massive, elle pourrait avoir comme finalité de provoquer une crise de légitimité des institutions, forcer l'ouverture de négociations. Comme il n'y en eut jamais, ce serait une première. 

En cinquante ans d'existence, le Parti québécois n'a jamais voulu négocier de bonne foi et, du reste, il ne s'y est jamais préparé. Il a très tôt recouru à des stratagèmes de contournement épuisants et stériles : les référendums. Pire, il a ruiné par son improvisation et son amateurisme les débats constitutionnels de 1981, les seuls de cette importance depuis 1865. Pour apprendre finalement que René Lévesque avait été humilié. La Nuit des longs couteaux, le drame personnel d'un chef errant. Mais le vrai scandale était le silence de mort du Québec sur la question nationale pendant des mois. Peut-on avoir réclamé de négocier la souveraineté-association pendant douze ans et faire pire ? 

Si une question nationale existe encore au Canada, il faudra bien un jour trouver quelqu'un pour occuper la chaise laissée vacante par le royaume de la péquisterie. Entre temps, la participation au parlement fédéral dans un contexte d'injustice nationale avéré, contribue à légitimer le fédéralisme. D'évidence, la participation du Bloc en est une de vrais collabos du régime. 

Après avoir dressé ce tableau, le Bonnet des patriotes n'aura pas la prétention de lancer un mot d'ordre d'abstention, n'étant que trop conscient de son poids politique. Mais on fera tout de même un coup de pratique, en lançant l'idée d'un abstentionnisme actif et militant, que l'on souhaite tout de même un peu contagieux. Ceux qui avaient déjà l'idée de s'abstenir ou d'annuler se sentiront moins seuls. Espérons qu'en nous lisant ils trouveront des motifs supplémentaires à leur geste. Qui sait ?  

On ne terminera pas cette prise de position sans se faire le plaisir de  renvoyer dos à dos ceux qui ne veulent pas parler d'indépendance et ceux qui veulent en parler tout le temps. Ils forment ensemble le coté pile et le coté face d'une même pièce.  La résolution de la question nationale n'étant pas selon nous tributaire d'une pédagogie dans l'entre-soi, au sein de la nation demanderesse. Laissons la pédagogie à l'école. La question nationale est une affaire politique pour adultes. Son succès est tributaire d'un engagement politique d'opposition sur tous les enjeux du contentieux national, en partant d'une assumation totale de notre histoire. Une opposition musclée, articulée, qui devra rendre intenable le statu quo institutionnel. Un processus de démontage d'un colonialisme qui continue de régir en filigrane les rapports entre deux colonies de peuplement européennes superposées. Celle des vainqueurs et celle des vaincus.  Si une Allemagne vaincue a pu récupérer ses droits après 1945, la nation canadiEnne, elle, attend toujours le rétablissement des siens. 
                                                                                                                                                                    
Mais rassurez-vous. Comme plusieurs l'auront déjà deviné, on ne déchirera pas notre chemise pour que nos lecteurs s'abstiennent de voter. Ça n'en vaut pas la peine. Que vous votiez ou non, on encouragera sans réserve une sorte d'abstentionnisme actif de tous les jours. Nous invitons nos lecteurs à rejoindre le Bonnet des patriotes, il vous offre une participation aux affaires publiques à intégrer dans son mode de vie, plutôt qu'un vote tous les quatre ans. 

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