Un incident diplomatique s’est produit, mardi, à l’arrivée en Chine du ministre allemand de l’économie Sigmar Gabriel. Pékin dénonce « les tendances de plus en plus protectionnistes » de son partenaire commercial.
A la surprise générale, le ministre du commerce, Gao Hucheng, a annulé à la dernière minute une apparition publique commune qui devrait ouvrir la session de la commission économique sino-allemande, le comité de coordination le plus important des deux ministères du commerce. Un événement qui en dit long sur l’incompréhension croissante entre les deux pays, alors que Berlin a bloqué deux rachats de pépites de l’économie allemande par des investisseurs chinois.
Selon l’entourage de Sigmar Gabriel, son homologue et lui se sont rencontrés pour déjeuner mardi, et ont eu un « échange intense ». A la suite de quoi Gao Hucheng ne s’est pas présenté pour le discours commun qu’ils devaient tenir. Parallèlement, l’ambassadeur de Chine a fait paraître une tribune, dans le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung daté mercredi 2 novembre, intitulée : « On ne devrait pas traiter un partenaire ainsi », où il fait part de son « inquiétude face aux tendances de plus en plus protectionnistes en Allemagne ».
Le texte rappelle quelques chiffres lapidaires : 8 000 firmes allemandes sont installées en Chine, pour un investissement total de 60 milliards d’euros ; sur le secteur automobile, les trois premiers constructeurs allemands détiennent 30 % du marché chinois ; Volkswagen à lui seul écoule 45,2 % de sa production dans la République populaire.
Critiques et incompréhensions
Visiblement, les Chinois ont peu goûté la franchise du vice-chancelier allemand, qui n’a laissé planer aucun doute sur le fait que, dorénavant, les investissements provenant de Chine seraient regardés à la loupe. C’est un revirement dans la politique allemande vis-à-vis d’un de ses plus gros partenaires économiques : là où les investissements chinois étaient jusqu’ici accueillis avec bienveillance, c’est la méfiance qui désormais domine outre-Rhin, face à l’appétit du géant asiatique.
Fin octobre, de manière inattendue, le ministère de l’économie avait empêché le rachat du constructeur de machines Aixtron, spécialiste des installations de fabrication de puces électroniques. Selon la presse allemande, les États-Unis ont fait pression sur Berlin contre ce rachat, arguant que l’investisseur chinois est proche de l’État, et que les puces produites grâce aux machines Aixtron, particulièrement résistantes à la chaleur, sont susceptibles d’être utilisées dans l’armement nucléaire. Deux jours plus tard, Berlin a retiré son autorisation de rachat, par un autre investisseur chinois, de Ledvance, un département d’Osram spécialisé dans l’éclairage par LED. Deux affronts pour Pékin, dont le ministère des affaires étrangères a convoqué lundi les représentants diplomatiques allemands en poste en Chine.