01.10.2016 - Coloniser Mars : il nous reste six ans pour répondre à ces questions cruciales

Selon Elon Musk, SpaceX pourra envoyer une première colonie d'une centaine d'humains sur Mars dès 2022. Ce qui laisse six ans pour répondre à des questions fondamentales sur la gouvernance de la colonie, son mode de fonctionnement économique, le sort qu'elle devra réserver aux délinquants et aux malades, etc.

Avec son très impressionnant Interplanetary Transport System, que l’on aurait tort de prendre pour de la science-fiction, Elon Musk ambitionne de déplacer 100 millions de terriens vers Mars d’ici une centaine d’années, en commençant par 100 candidats « prêts à mourir » dès l’année 2022. Pour ce faire SpaceX veut construire des centaines de navettes réutilisables qui seront capables de faire le voyage en partant par grappes, tous les deux ans, lorsque s’ouvriront les fenêtres géospatiales permettant de rejoindre Mars en moins d’une centaine de jours. Mais 100 millions d’êtres humains qui vont coloniser Mars, sont-ce encore des Terriens qui doivent être gouvernés par les lois terriennes, ou s’agit-il d’un peuple nouveau qui aura une totale autonomie ?

Les questions éthiques et juridiques posées par le projet de colonisation de Mars sont innombrables, elles plongent dans des problématiques que l’on croyait encore réservées aux romans SF, ou aux livres d’histoire qui parlent de la découverte des terres inconnues par les grands explorateurs.

De quelle nationalité seront les humains martiens ?

Personne n’a jamais imaginé qu’en allant sur la Lune, Neil Armstrong perde sa nationalité américaine. Même s’ils étaient restés sur le rocher lunaire, la poignée d’astronautes qui ont pu fouler le sol du satellite seraient toujours restés des Terriens, qui auraient gardé leur attache nationale. Mais qu’en est-il lorsque l’on devient des milliers, des centaines de milliers voire des dizaines de millions à quitter la Terre et ses gouvernements terriens pour créer une colonie spatiale qui donnera naissance à des petits Martiens ?

C’est un véritable peuple nouveau qui s’apprête à être créé, avec son propre territoire, à la manière des peuples nés des explorations de l’homme sur Terre. Nous avons vu que dans l’Histoire, l’attache s’est généralement faite avec le pays d’origine des explorateurs, avant que naissent des revendications d’autonomie voire d’indépendance, et que même que des guerres éclatent pour l’obtenir.

Juridiquement toutefois, le Traité de l’ONU sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique prévoit en son article 2 que « l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, ne peut faire l’objet d’appropriation nationale par proclamation de souveraineté, ni par voie d’utilisation ou d’occupation, ni par aucun autre moyen ». Mais il n’interdit pas l’appropriation privée et d’ailleurs les États-Unis ont promulgué en 2015 un « Space Act » qui autorise les entreprises américaines comme SpaceX à s’approprier des ressources de l’espace.

Théoriquement, les individus resteront régis sur Mars par les lois de chacun de leurs états terriens respectifs, tandis qu’ils seront régis par les lois américaines tant qu’ils seront à bord des navettes SpaceX battant pavillon américain. On pressent bien toutefois que l’absence d’uniformité du droit rendra impossible la constitution d’un peuple organisé paisiblement, et qu’il faudra bien qu’une seule loi s’impose à tous, sauf à se risquer à adopter un modèle anarchique.

Dès lors, il faudra peut-être inventer une nationalité martienne, avec un système juridique martien.

Comment seront adoptées les lois sur Mars ?

Si l’on part donc du postulat que les lois terriennes ne s’appliqueront plus, faut-il faire perdurer sur Mars les modèles de gouvernance terriens qui aboutissent à l’élaboration des lois, ou faut-il inventer une toute autre manière de définir les règles de vie commune ? Elon Musk lui-même avait répondu à cette question en se prononçant contre les règles de la « démocratie représentative » qui font que sur Terre, dans la plupart des pays du monde, les Terriens se déplacent quelques fois dans leur vie pour choisir dans une liste fermée les quelques uns d’entre eux qui doivent prendre des décisions sur la vie de la Cité.

« La forme la plus probable de gouvernement serait une démocratie directe, pas une démocratie représentative. Donc nous aurions des gens qui votent directement sur les sujet. C’est probablement mieux, parce que le risque de corruption est sensiblement diminué », avait-il plaidé. Il se disait favorable à certaines règles constitutionnelles inédites comme la possibilité qu’une minorité qualifiée (par exemple 40 %) puisse obtenir la suppression d’une loi qui ne leur va pas, ou que les lois aient systématiquement une date d’expiration pour éviter qu’elles s’accumulent avec le temps. Seules celles qui sont jugées toujours utiles seraient prolongées.

 

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