Dans une note, à la page 153 de son dernier livre Le journal de Lisée. 18 mois de pouvoir, mes combats, mes passions (Éditions L’Actualité), Jean-François Lisée écrit :
« Selon une légende assez répandue, je proposerais de remplacer les principes du ‘‘français langue officielle et langue commune’’ par le concept de ‘‘prédominance du français’’. C’est faux. Je ne veux pas remplacer, mais ajouter. C’est parce que le français est langue officielle et commune que, par la force des choses, il est prédominant. Alors à quoi bon? Parce qu’il est bon d’indiquer que le français n’est pas seul : il y a les langues des Premières nations et de notre minorité anglophone. On prédomine, mais on ne vise pas éliminer les autres. Ce n’est pas sans importance, lorsqu’on est minoritaires. »
Du grand Lisée! Toujours tenter de concilier l’inconciliable, de fusionner des positions opposées!
Selon sa logique abracadabrante et alambiquée, il faudrait donc saluer la Cour Suprême qui, dans l’arrêt Ford de 1998, invalidait l’unilinguisme dans l’affichage pour le remplacer par la « nette prédominance du français », parce qu’elle « ajoutait » l’anglais au français!
Et quand il nie vouloir remplacer les principes du « français langue officielle et langue commune » par le concept de « prédominance du français », il MENT effrontément !
Dans son livre Sortie de secours (Boréal), publiée en 2000, il suggère de « constitutionnaliser le principe de prédominance du français dans l’affichage, pour établir cette réalité une fois pour toutes dans une future constitution québécoise ».
Dans un chapitre intitulé « La prédominance du français : un concept rassembleur collé sur le réel », il incite le gouvernement « à ajouter dorénavant à ces objectifs (de français langue officielle et langue commune) le concept-clé de prédominance du français ».
Unilinguisme ou bilinguisme?
Sur la question linguistique, il y a deux voies opposées, contradictoires et irréconciliables. D’un côté, il y a une politique linguistique qui découle de la Charte de la langue française et de ses deux principes fondamentaux : le français, langue officielle et le français, langue commune.
De l’autre, il y a une politique linguistique qui origine de l’arrêt Ford de 1988 de la Cour suprême du Canada, qui impose le principe de la « nette prédominance du français » - donc le bilinguisme – en prenant pour référence la Charte canadienne des droits, la Charte de Trudeau. Ces deux approches ne sont pas interchangeables. Il faut donc choisir sa Charte.
Rappel historique
En décembre 1988, la Cour suprême du Canada invalidait l’article de la Charte de la langue française sur l’affichage. La Cour, par l’arrêt Ford de 1988, statue que la notion de liberté d’expression comprend les messages commerciaux et que l’interdiction d’employer une autre langue que le français est incompatible avec le droit à l’égalité garanti par les chartes.
Cependant, magnanime, la Cour considère comme justifié le fait d’exiger la présence du français dans la publicité commerciale et les raisons sociales. Elle affirme même que l’exigence de la nette prédominance du français serait juridiquement et constitutionnellement admissible.
Le Québec français se souleva d’un bloc contre ce jugement. Manifestations et assemblées se succédèrent. Les locaux d’Alliance Québec furent incendiés. Sous la pression populaire, le gouvernement Bourassa fait adopter, en décembre 1988, la loi 178.
Lire la suite sur L'aut'journal