24.08.2016 - Avant l’agriculture : peu de caries et des mâchoires parfaitement adaptées aux dents

L’émergence des pratiques agricoles ont déclenché des changements significatifs dans la structure de la mâchoire des humains, menant aux problèmes dentaires dont nous souffrons encore aujourd’hui.

Nos bouches n’ont souvent pas assez de place pour accueillir nos dents — les chevauchements dentaires, la cause la plus commune de traitements orthodontiques, avec les malocclusions (mauvais alignement des dents), affectent une personne sur cinq.

Nos ancêtres lointains ne souffraient pas de ces problèmes. Au contraire, comme une nouvelle étude l’a démontré, jusqu’à il y a 12 000 ans, les humains bénéficiaient de ce que l’un des principaux auteurs de l’étude appelle « une harmonie parfaite entre leur mâchoire inférieure et leurs dents ».

Le grand changement, expliquent les scientifiques, provient de la transition civilisationnelle de chasseurs-cueilleurs à agriculteurs. L’étude, publiée cette semaine dans la revue scientifique PLOS One, analysait « les dimensions des mâchoires inférieures et des couronnes dentaires de 292 squelettes archéologiques du Levant, d’Anatolie et d’Europe, datant d’il y a entre 28 000 et 6000 ans », rapporte l’University College de Dublin, où le principal auteur de l’étude, Ron Pinhasi, est professeur d’archéologie.

Pinhasi et ses collègues ont découvert une différence significative dans la structure de la mâchoire, coïncidant avec l’émergence de l’agriculture. Comme il l’explique dans une publication :

« Notre analyse montre que les mâchoires inférieures des premiers agriculteurs du Levant ne sont pas que plus petites que celles de leurs prédécesseurs chasseurs-cueilleurs, elles ont aussi subi une série complexe de changements de formes à mesure de la transition vers l’agriculture ».

Ces changements sont probablement liés au régime alimentaire, ce que de précédentes études suggéraient. Les chasseurs-cueilleurs avaient besoin d’une grande et puissante mâchoire pour mastiquer les végétaux non-cuits qui composaient souvent leur menu. Les premiers agriculteurs, d’un autre côté, avaient un régime alimentaire doux, consommant des aliments cuits comme des haricots et des céréales, n’avaient pas besoin d’une mâchoire aussi puissante. Avec le temps, tandis que les mâchoires devenaient plus petites à cause de ces changements de régimes alimentaires, les dents ne suivirent pas, et ne changèrent pas de taille. Ce qui a directement conduit aux problèmes dentaires si communs aujourd’hui. Nous avons des mâchoires modernes, mais un nombre de dents potentiellement obsolète.

Observez les dents de la plupart des fossiles des premiers humains, vous y trouverez peu de caries. Étrangement [ou pas, sic], pendant les millions d’années de la préhistoire de l’humanité, nos ancêtres bénéficiaient d’une santé buccale généralement bonne – bien que leurs soins dentaires dépassaient rarement l’usage de simples cure-dents.

D’ailleurs, les caries ne sont devenus des problèmes courants que très récemment – il y a environ 10 000 ans – au début du Néolithique, lors de la transition vers l’agriculture. La dentisterie sophistiquée émergea par la suite.

Les caries dentaires ne sont pas entièrement absentes des sociétés préagricoles, mais y étaient très rares. « La fréquence des caries chez les chasseurs-cueilleurs était de 1-5%, et de 6-8% parmi les populations aux stratégies de subsistance mixtes », explique Alejandra Ortiz, de l’Université de New-York. « Contrairement aux populations agricoles, qui présentent des fréquences de caries dentaires s’étalant de 10% jusqu’à 80-85% ».

Le passage à l’agriculture n’a pas seulement entrainé des changements au niveau de la mâchoire. Deux études publiées l’an dernier soulignent que l’émergence de l’agriculture a probablement précipité d’autres changements squelettiques chez l’humain, dont des os plus légers, moins denses, particulièrement au niveau des articulations. De tels développement semblent être liés à la fois au changement de régime alimentaire et d’activité physique, particulièrement au mode de vie plus sédentaire rendu possible grâce à l’agriculture et aux animaux domestiques.

Certains affirment (non sans controverse) que le changement civilisationnel vers l’agriculture est l’origine première des nombreux maux de la société. Il s’agit d’un sujet bien différent, mais une chose est sûre : les orthodontistes ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui si nos ancêtres n’avaient pas fatidiquement adopté l’agriculture. La même chose est vraie de chacun de nous.

 

Source : Le Partage

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