30.06.2016 - Jusqu’à quand Qaa, village chrétien limitrophe de la Syrie, résistera-t-il ?

Pendant que la localité enterre ses morts, la menace terroriste n'a jamais été aussi réelle.

Le village de Qaa s'est réveillé hier matin. Mais le cauchemar des huit attentats-suicide perpétrés lundi ne se dissipera pas pour autant. Les meurtrissures sont toujours là, indélébiles. Comme les portraits géants des cinq victimes des kamikazes. Accrochés sur la façade de l'église Saint-Élie, sur la place publique du village, où se dresse, triomphante et confiante, la statue du saint patron protecteur de ce village chrétien, ils sont là pour rappeler l'ampleur du drame qui s'est produit.

Depuis lundi, Qaa est hermétiquement fermé par un périmètre de sécurité, maintenu par les soldats de l'armée, qui sont déployés dans toutes les ruelles, sur les toits des maisons et au niveau de tous les accès menant à la bourgade, ainsi que sur la route reliant à la région de Macharih el-Qaa. Les habitants, qui ont l'habitude d'aller aux champs chaque matin, se sont rendus après une nuit interminable au salon de l'église pour le déblayer et dresser des tentes à l'extérieur du lieu de prière, afin de pouvoir accueillir les centaines de personnes attendues pour les funérailles des victimes, à 17 h.

Infatigables sentinelles

Les jeunes du village, qui ont assuré depuis lundi soir à tour de rôle le guet avec l'aide des soldats, ont à peine eu le temps de changer de tenue pour donner un coup de main là où le besoin se fait ressentir, tout en sachant que la nuit sera aussi longue que les deux autres qui l'ont précédée. « Je viens de terminer ma garde, je ne peux quitter mon poste avant qu'une autre personne ne vienne prendre la relève », explique Thaer el-Tom, un coach personnel, par ailleurs militant du Parti syrien national social (PSNS), qui a laissé tomber provisoirement son travail à Beyrouth pour prêter main-forte à ses cousins au sein de la localité. « L'armée ratisse régulièrement le village et ses environs. Il y a en effet une théorie selon laquelle les kamikazes qui se sont fait exploser lundi en soirée étaient cachés depuis l'aube dans la broussaille derrière l'église. La plaine est en tout cas immense et difficile à surveiller. C'est pour cela que l'armée est omniprésente seulement aux alentours du village », explique le jeune homme. « Tous les hommes de la localité s'entraident indépendamment de leur appartenance politique. Nous sommes tous unis face à un même danger », souligne-t-il.

« Nous ne quitterons pas notre terre »

Le vice-président de la municipalité, Dany Awad, qui a lui aussi assuré le guet depuis lundi, est intransigeant lorsqu'il s'agit des menaces qui pèsent sur le village : « Nous n'avons peur de personne. Nous allons rester ici et défendre notre village jusqu'au bout. Nous sommes enracinés dans cette terre sacrée et personne ne pourra nous en arracher vivants. Nos femmes porteront les armes s'il le faut ! Tel est d'ailleurs le message que nous avons voulu transmettre par le biais des réseaux sociaux. Mais, heureusement, nous n'en sommes pas encore là. »

« Nous sommes tous armés, avec les moyens dont nous disposons : des fusils de chasse, des pistolets, des mitraillettes, tout ce qui peut assurer notre défense. Et les hommes du village sont prêts à tout. Nous ne partirons pas. Qaa, c'est notre chez-nous ! Que l'État expulse ceux qui ne sont pas chez eux et qui menacent nos terres et notre sécurité », reprend-il. « Il y a plus de 30 000 déplacés syriens dans les camps de Macharih, et l'armée y a déjà effectué des perquisitions en annonçant par la suite qu'il y avait des cellules terroristes dormantes. Qu'attend donc le gouvernement pour donner le feu vert à la troupe afin qu'elle puisse une fois pour toutes assainir ces camps, qui sont des îlots d'insécurité ? » se demande-t-il.

 

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