15.06.2016 - Brexit : vers une crise des changes ?

La livre sterling est sous pression depuis que le Brexit est donné vainqueur dans les sondages. En cas de sortie de l'UE, faut-il s'attendre à un choc monétaire outre-Manche ?

La perspective du Brexit rend le marché des changes très nerveux. La livre sterling a en effet beaucoup baissé depuis le 25 mai, date de la parution des premiers sondages annonçant une inversion de tendance de l'opinion britannique en faveur de la sortie de l'UE. Depuis cette date, la livre est passée de 1,3175 euro à 1,26 euro, soit un recul de 4,3 %. Face au billet vert, le recul est de 3,7 % à 1,416 dollar. Pour beaucoup, ce recul de la monnaie britannique annonce une catastrophe à venir en cas de vote en faveur du Brexit. L'étude du Trésor britannique sur les conséquences d'un divorce avec l'UE évalue le recul de la livre de 15 %. La plupart des prédictions tablent tous sur une correction après le vote, comprise entre 5 % et 30 % !

Pourquoi le Brexit inquiète sur le marché des changes

L'effet négatif sur la monnaie britannique d'un vote en faveur du Brexit ne fait pas l'ombre d'un doute. La raison en est simple : le vote « Leave » ouvrira une période d'incertitude juridique et économique. Pendant deux ans au minimum (la période peut être élargie), le Royaume-Uni devra négocier un nouveau régime de relations avec l'Union européenne. De ce nouveau régime dépendra notamment l'accès du Royaume-Uni au marché unique européen. Dans le cas britannique, cet élément est particulièrement important dans le cas des services. Privé d'un libre accès à ce marché, Londres pourrait être moins attirante pour les investisseurs, notamment ceux actifs dans la finance, mais aussi pour les sièges sociaux paneuropéens. Des éléments extrêmement importants pour l'économie britannique. Même si toute l'activité ne s'effondrera pas, il y aura là une forte incertitude. Or, les marchés détestent l'incertitude. Les opérateurs de change vont donc naturellement chercher à réduire, après le vote en faveur du Brexit, leur exposition à la livre.

La livre, Brexit-dépendante ?

Le mouvement a d'ailleurs débuté. La livre sterling évolue en réalité au rythme des publications de sondages et de l'évolution des cotes chez les bookmakers (considérée outre-manche comme un élément de prédiction historiquement beaucoup plus fiable que les sondages). La livre baisse donc à mesure que le Brexit devient plus probable. Et elle remonte lorsque le maintien dans l'UE revient en grâce. Jamais l'indice de volatilité de la monnaie britannique n'a été aussi élevé depuis la crise de 2008-2009.  Ceci est renforcé par le fait que les investisseurs vivaient jusqu'à la fin du mois de mai dans une sorte de certitude que le Brexit était une fiction improbable. La livre avait ainsi progressé de 6,5 % entre début avril et fin mai face à l'euro, revenant à son niveau de début janvier. Le réveil a été violent et a ramené la livre à un niveau intégrant un peu plus le risque.

Retour à la normale ?

Cette chute de la livre est-elle inquiétante ? Pour le moment, elle ne présente rien d'anormal. En réalité, c'est bien plutôt le renforcement de la livre en avril et mai qui semblait étrange. Les fondamentaux de la monnaie britannique plaident en effet plutôt pour son affaiblissement. La trajectoire de croissance du Royaume-Uni se dirige plutôt vers un ralentissement. Au premier trimestre 2015, le PIB britannique a progressé de 0,4 % contre 0,6 % au trimestre précédent. C'est moins que la zone euro (0,6 %). De plus, la Banque d'Angleterre n'envisage pas de remonter immédiatement ses taux, à la différence de la Fed.

Une baisse encore limitée

Surtout, le Royaume-Uni accuse un déficit courant monumental, de 7 % de son PIB, alors que la zone euro dégage un excédent courant de 3 % du PIB. Ceci conduit à une forte demande de devises, notamment d'euros, outre-manche. C'est un élément structurel qui tend à faire reculer la livre et qui abaisse également le taux d'équilibre de la monnaie britannique. Face à l'euro, ce niveau est autour de 1,15 ou 1,20 euro. On s'y dirige, mais les sondages en faveur du Brexit ont peut-être simplement, pour le moment, ramené la monnaie de Sa Majesté à des niveaux plus raisonnables. En tout cas, à ce niveau, il n'y a aucun risque macroéconomique majeur.

 

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