13.05.2016 - Dépolluer les sols contaminés aux métaux lourds avec des plantes : intox ou réalité ?

Plomb, zinc, cadmium… Les sols n’ont pas été épargnés par des décennies d’industrialisation. Les adeptes de l’agriculture urbaine lorgnent sur les friches aux abords des villes. Mais comment rendre ces terrains à nouveau cultivables ? Des expérimentations révèlent la capacité de certaines plantes à immobiliser ou extraire partiellement les polluants. Des travaux sont également menés pour recycler les métaux accumulés dans les végétaux. Ces techniques de dépollution, basées sur les plantes, sont-elles efficaces et suffisantes ? Tour d’horizon des possibles.

Plus de 300 000 sites seraient potentiellement pollués en France suite à des activités métallurgiques ou minières. Soit une surface d’environ 100 000 hectares [1] – l’équivalent de près de 2000 exploitations agricoles ! Devant cet immense gisement foncier, on se prend à rêver de jardins partagés, de cultures maraichères, de vergers, s’étalant sur d’anciennes zones industrielles désaffectées. Mais peut-on assurer une décontamination suffisante de ces sols pour les rendre à nouveau cultivables ? Les plantes peuvent-elles être une solution pour les dépolluer ?

Légalement, les entreprises ont une obligation de remise en état de leurs sites [2]. À ce jour, les techniques d’excavation, consistant à enlever la terre puis à la mettre en décharge ailleurs, demeurent la voie privilégiée. « Ce sont des techniques qui permettent de résoudre immédiatement la pollution du sol, mais elles restent très coûteuses », indique Valérie Bert, ingénieure à l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris). L’excavation, qui revient à déplacer le problème de la pollution sur un autre site, ne peut être utilisée que pour de faibles volumes de matériaux à traiter.

De nouvelles techniques ont émergé, basées sur l’utilisation des plantes. Leur nom ? « Phytotechnologies » [3]. « Avec ces techniques, nous ne faisons pas de la dépollution, contrairement à ce qui est souvent dit dans les médias, mais de la gestion du risque par la maîtrise des impacts », tient à préciser d’emblée Frédérique Cadière, du département Friches urbaines et sites pollués de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), organisme public qui gère certains sites pollués [4]. L’enjeu est de limiter les transferts des contaminants dans l’environnement et, en suivant la chaine alimentaire, vers les herbivores. On assume que l’on va laisser les polluants mais on en limite les effets »

Des plantes qui extraient partiellement les polluants

Si les techniques de phytotechnologie ne sont pas encore sur le marché, elles font l’objet de plusieurs programmes de recherche. La technique la plus avancée en terme de développement porte le nom de « phytostabilisation ». Elle consiste à planter une couverture végétale qui immobilise les contaminants dans le sol. « On se sert des avantages du couvert végétal pour éviter le contact avec la surface, limiter le ruissellement et l’infiltration des eaux de pluie vers la profondeur du sol, et les transferts de polluants vers les nappes souterraines », précise Frédérique Cadière. Réintroduire de la végétation permet également de limiter l’érosion et d’éviter que le vent ou la pluie n’éparpillent des éléments métalliques autour du site. Des bactéries ou des champignons peuvent être ajoutés pour immobiliser les polluants au bord des racines. « L’immobilisation des polluants se fait très rapidement. Les premiers effets peuvent être observés au bout de quelques semaines », appuie Valérie Bert, de l’Ineris.

D’autres plantes vont davantage absorber et transporter des quantités significatives de polluants vers leurs tiges et leurs feuilles. On parle alors de « phytoextraction ». Les racines des plantes ne pouvant descendre que jusqu’à un mètre environ de profondeur dans le sol, elles ne peuvent extraire que partiellement les polluants. « On n’atteint qu’une partie des éléments métalliques, cette technique n’est donc qu’une solution partielle à la décontamination », souligne Frédérique Cadière.

Que faire ensuite de ces tiges et feuilles remplies de métaux lourds ? Des essais de combustion ont été menés par l’Ineris. « Si cette biomasse issue de sols pollués est brûlée en chaudière équipée de systèmes de filtration efficaces, il n’y a pas de problèmes avec les émissions dans l’air », précise Frédérique Cadière. Reste la question des sous-produits, comme les cendres issues de cette combustion. Selon les métaux contenus dans les cendres, celles-ci pourraient être épandues dans la nature.

 

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