10.04.2016 - Mégapoursuite de 330 millions $ au CUSM: un écueil de plus pour les PPP

Le consortium qui a construit le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) en partenariat public-privé (PPP) poursuit le gouvernement pour 330 millions de dollars! C’est beaucoup d’argent. Mais l’énormité de la nouvelle ne m’a pourtant pas étonné. Parce qu’on aura vraiment tout vu avec les PPP.

Ce n’est pas d’hier que les PPP en santé – transfert au privé de la conception, de la construction et de l’entretien prolongé des mégahôpitaux – reçoivent leur lot de critiques. Avec ce litige autour du CUSM, on vient tout de même de franchir une nouvelle étape.

Le consortium et le CUSM étaient en discussion depuis deux ans pour régler la question des frais. Puis, au mois d’août 2015, on déplorait des vices de construction, pour lesquels le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, refusait de payer. La poursuite actuelle s’explique par des positions inconciliables.

Le ministre ne semble pas s’en émouvoir outre mesure aujourd’hui, décrivant cette poursuite comme une stratégie de négociations.

Au fait, j’espère que toutes ces démarches juridiques, une plaie dans le modèle PPP, ne nous coûteront pas les yeux de la tête. Le PPP qui gère la construction du nouveau Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) a déjà engendré plus de 10 millions de dollars de frais pour des «avocasseries».

Au CUSM, la poursuite faramineuse s’ajoute aux irritants vécus par les patients, le personnel et les médecins depuis l’ouverture du centre hospitalier, où des «milliers» de problèmes auraient été recensés. On notait par exemple le bris d’un pneumatique pourtant ultramoderne et des problèmes d’égouts ayant empêché d’utiliser certaines unités. C’est sans parler des compressions budgétaires, qui mèneraient à la fermeture de certaines unités de soins durant l’été, notamment des deux unités de court-séjour médical relevant de l’urgence pour une période de quatre mois.


Retour quelques années en arrière

Remontons un peu dans le temps pour mieux comprendre comment nous en sommes arrivés là.

Il faut d’abord se rappeler que la construction d’hôpitaux n’avait jamais vraiment été une source de problèmes majeurs au Québec, ni au chapitre des échéanciers ni des coûts. Ce qui est curieux, pour ne pas dire idéologique, c’est que, malgré l’absence de problèmes, il a fallu adopter une «solution»: les PPP.

Ainsi, au cours des mandats consécutifs du gouvernement Charest, les PPP en santé ont rapidement pris le devant de la scène. Le prétexte de la construction de deux hôpitaux universitaires allait ainsi permettre de mettre un (gros) pied dans la porte.

Le choix définitif des PPP pour construire les deux centres montréalais remonte aux années 2008-2009. À l’époque, la ministre Monique Jérôme-Forget ne jurait que par les PPP. Elle avait formé une direction pour les promouvoir, dirigée par un ardent défenseur des PPP, monsieur Pierre Lefebvre, remercié quelques années plus tard.

Les arguments bétonnés (sans jeux de mots) se déclinaient essentiellement en trois points:

1. Il ne peut y avoir de fraudes avec un PPP;

2. Les risques sont transférés vers un promoteur privé;

3. Il n’y a pas de dépassement de coûts.

En 2011, l’ex-ministre Jérome-Forget, après son départ de la politique, soutenait toujours sa thèse, dont la solidité commençait à être sérieusement remise en doute:

«Les PPP, ça sauve la fraude. Et les dépassements de coûts. Ce qui fait que les ingénieurs n’aiment pas ça», soutient-elle. De l’avis de Mme Jérôme-Forget, les PPP entraînent une concurrence accrue et impliquent trop d’intervenants pour permettre la fraude. «Tout se sait, tout se suit, il y a des témoins dans tout.»

Examinons les trois éléments mentionnés.

 

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