12.12.2015 - Pourquoi des chercheurs vont percer la croûte terrestre

Un entretien avec Lydéric France

Maître de conférences au Centre de recherches pétrographiques et géochimiques (CRPG, une unité mixte de recherche du CNRS et de l’université de Lorraine), Lydéric France se trouve à bord du navire océanographique américain JOIDES Resolution, qui vogue actuellement dans l'océan Indien en direction d'une dorsale océanique située au sud-est de Madagascar, qu'il atteindra dans quelques jours.

Grâce à ce bateau doté d'une tour de forage, la mission scientifique internationale SloMo, coordonnée par l'International Ocean Discovery Program (IODP), compte réaliser une première mondiale : percer la croûte terrestre. Lydéric France a aimablement accepté de répondre à mes questions sur cette expédition que Jules Verne aurait sans doute appréciée...

Quels sont les principaux objectifs de cette mission SloMo ?

L’objectif premier est d’effectuer un forage de plusieurs kilomètres, le plus profond jamais réalisé dans les fonds océaniques, pour atteindre le fameux Moho, un niveau encore jamais échantillonné dans les océans actuels. Au-delà du défi scientifique, SloMo est donc aussi un défi technique. Les roches magmatiques prélevées nous permettront de répondre à de grandes questions scientifiques de premier ordre qui restent à ce jour sans réponse. La discontinuité de Mohorovicic découverte en 1909 – et que l’on nomme en général Moho – est un niveau où la vitesse des ondes sismiques est modifiée par un changement des propriétés physiques des roches se trouvant en profondeur. L’interprétation classique est que le Moho représente la transition entre la croûte en surface et le manteau terrestre en profondeur. Néanmoins des hypothèses alternatives existent : au niveau des fonds océaniques le Moho pourrait plutôt enregistrer la transition entre des roches du manteau altérées par l’eau de mer (les serpentinites), et le manteau non altéré formé de péridotites. C’est cette hypothèse que nous allons tester dans l’océan Indien au niveau de l’Atlantis Bank.

Y a-t-il une raison particulière qui a présidé au choix de ce site ?

L’Atlantis Bank est étudié par les spécialistes de la croûte océanique depuis une bonne trentaine d’années. Pourquoi lui ? Premièrement, l’épaisseur moyenne de la croûte océanique est beaucoup plus faible (5 à 8 km) que celle de la croûte continentale (25 à 60 km), ce qui nous amène à tenter d’atteindre le Moho au niveau des fonds océaniques.  Ensuite, l’hypothèse alternative que je viens de citer est associée au Moho de la croûte océanique : il nous fallait donc une cible au fond de la mer. Les nombreuses missions océanographiques de reconnaissance effectuées depuis plusieurs décennies ont permis d’identifier quelques cibles-clés où le Moho serait atteignable tout en apportant une quantité d’informations énorme en forant pour l’atteindre. Parmi elles figurait Atlantis Bank où le Moho est identifié à environ 5 km.

 

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