08.08.2015 - Clinton, Juppé, Erdoğan, Daesh et le PKK

La reprise de la répression contre les Kurdes en Turquie n’est que la conséquence de l’impossibilité de réaliser le plan Juppé-Wright de 2011. Alors qu’il a été facile de déployer Daesh dans le désert syrien et dans les provinces de Ninive et d’al-Anbar (Irak), à majorité sunnite, il s’est avéré impossible de prendre le contrôle des populations kurdes de Syrie. Pour réaliser son rêve d’un Kurdistan hors de Turquie, Recep Tayyip Erdoğan n’a pas d’autre choix que la guerre civile.

En arrivant au pouvoir à Ankara, en 2003, le parti islamiste AKP a modifié les priorités stratégiques de la Turquie. Plutôt que de se baser sur les rapports de force post-« Tempête du désert », Recep Tayyip Erdoğan ambitionnait de sortir son pays de l’isolement dans lequel il se trouvait depuis la chute de l’Empire ottoman. S’appuyant sur les analyses de son conseiller, le professeur Ahmet Davutoğlu, il préconisa de régler les problèmes en suspens depuis un siècle avec ses voisins et de devenir progressivement l’incontournable médiateur régional. Il lui fallait pour cela à la fois devenir un modèle politique et construire des relations avec ses partenaires arabes sans perdre son alliance avec Israël.

Débutée avec succès, cette politique —dite de « zéro problème »— conduisit Ankara non seulement à ne plus craindre Damas et son soutien au PKK, mais à lui demander de l’aider à négocier une sortie de crise. En octobre 2006, le parti kurde déclara une trêve unilatérale et débuta des négociations avec le gouvernement Erdoğan. En mai 2008, Ankara organisa des négociations indirectes entre Damas et Tel-Aviv, les premières depuis le rejet par Ehud Barack du plan de Bill Clinton et d’Hafez el-Assad. Mais le président Bachar el-Assad y mit fin lorsque Israël attaqua Gaza, en décembre 2009.

Réalisant qu’il n’était pas possible de maintenir de bonnes relations avec tous les États de la région compte tenu du conflit palestinien, Ankara choisit de soutenir les Palestiniens face à Israël. Ce furent les épisodes de Davos et de la Flottille de la Liberté. Disposant alors d’un vaste soutien populaire dans le monde musulman, Ankara se rapprocha de Téhéran et accepta, en novembre 2010, de participer à un marché commun Turquie-Iran-Irak-Syrie. Les visas furent abrogés ; les droits de douanes considérablement réduits ; un consortium fut constitué pour gérer les pipe-lines et gazoducs ; une autorité fut créée pour gérer en commun les ressources en eau. L’ensemble était si attractif que le Liban et la Jordanie s’y portèrent candidat. Une paix durable semblait possible au Levant.

Alors qu’en 2011 le Royaume-Uni et la France se lançaient dans une double guerre contre la Libye et la Syrie, à la demande et sous le contrôle des États-Unis, la Turquie s’y opposa logiquement. Ces guerres, entreprises sous couvert de protection des populations, étaient trop visiblement des entreprises néo-coloniales. En outre, elles portaient atteinte aux intérêts turcs, la Libye étant un de ses principaux partenaires économiques et la Syrie en devenant un à travers le nouveau marché commun régional.

C’est alors que tout bascula…

 

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