02.06.2015 - Comment les produits BIO sont tombés aux mains des multinationales

Le Troupeau aveugle de John Brunner (publié en 1972) est le chef d'oeuvre de l'écologie-fiction. C'était pour l'époque un ouvrage d'un pessimisme terrifiant, le plus dramatique de tout ce genre littéraire quant à ses descriptions poignantes de la pollution et de la destruction de l'environnement.

1972 est également l'année de publication de “L'Angoisse de l'an 2000” de Roger Heim, et de la création de la revue “la Gueule Ouverte”, “le Journal qui annonce la fin du monde”. Le titre anglais du “Troupeau Aveugle”, “The Sheep look up”, est emprunté au vers 125 du poème Lycidas de John Milton: «Les brebis affamées lèvent la tête (et ne sont point nourries)». Dans ce roman d'écologie-fiction, l'humanité se meurt soit de faim, soit de cancers provoqués par la pollution alimentaire et environnementale. John Brunner n'a pas vu venir, il est vrai, la pollution nucléaire généralisée et les délires des chimères génétiques : les cerises empoisonnées sur le gâteau toxique, excusons-le du peu. Ce qu'il a très bien vu venir dans “Le Troupeau aveugle”, par contre, c'est le rachat de la bio, le piratage de la bio, le frelatage de la bio… Quarante années plus tard, le troupeau aveugle, en quête de mieux-être et de nutrition digne de ce nom, se précipite dans les super-marchés “bios” sans se douter le moins du monde de l'identité de ceux qui tirent une grande partie des ficelles.

Dans mon essai “Les tambours de Gaïa se sont réveillés”, en novembre 2013, j'ai assurément lancé un gros pavé dans la mare en écrivant:

« En Europe et en Amérique du nord, la plus grande partie des distributeurs d'aliments “biologiques” ont été rachetés par les grands cartels de l'agro-alimentaire: Nestlé, Cargill, Coca-Cola, etc. En France, par exemple, Lima et Danival ont été rachetés par Hain Celestial, aux USA, derrière lequel se cache l'argent de Monsanto, Walmart, Philipp Moris, City Group et Martin Lockeed. En France encore, acheter les produits bios de Bonneterre, de Bjorg, d'Evernat, d'Allos, de Tartex, d'Alter Eco... c'est participer à la prospérité du Hollandais Royal Wessanen, l'un des grands groupes Européens de l'agro-alimentaire. En France encore, 95 % des légumes bios commercialisés sont produits à partir de semences de variétés hybrides F1; ce qui signifie que le consommateur bio, par exemple, a une “chance” sur deux d'acheter un melon bio “Monsanto/Bayer/Syngenta” puisque ces trois groupes de la chimie possèdent la moitié des 250 variétés de melons inscrites dans le catalogue national du GNIS; ce qui signifie que de très nombreux maraîchers bios sont complices de la destruction de la biodiversité alimentaire. En France encore, l'association Kokopelli est “certifiée” bio par Qualité France, qui a été racheté par Bureau Véritas, l'un des leaders mondiaux du contrôle industriel. Dans le Tiers-Monde, l'IFOAM (la fédération internationale de l'agriculture biologique) rabat du petit paysan pauvre pour produire du bio, et encore plus de bio, au service de l'export vers les pays riches, au service de l'industrie bio, et donc au service de l'industrie tout court. Ad nauseam. »

Depuis lors, certains militants me pressent de publier mes sources. Aujourd'hui, j'ose donc mettre en ligne une partie du dossier que j'ai commencé à rédiger sur le sujet de la bio piratée. Avec beaucoup de réticences, cependant, tellement tout cela est archi-déprimant. Il est possible, un jour étoilé, que je continue de rédiger les résultats de cette enquête que nous avons lancée. Pour l'instant, cependant, je consacre toutes mes énergies à la restructuration constructive et fertile de Kokopelli dans les Pyrénées de l'Ariège et c'est un grand plaisir. J'invite donc tous les militants très intéressés par ce sujet attristant - celui de la récupération d'une grande partie de la bio - à poursuivre eux-mêmes cette enquête. Il suffit de très peu de chose: savoir parler anglais et suivre la piste de l'argent.

En novembre 2012, lorsque l'Etat de Californie présenta au vote populaire la Proposition 37 destinée à rendre obligatoire l'étiquetage des OGMs, ce fut une levée de boucliers de la part de l'agro-chimie qui finança une campagne de rejet de cette proposition: Monsanto (7 millions de dollars), Dupont de Nemours (5 millions de dollars), BASF (2 millions de dollars), Bayer (2 millions de dollars), Dow (2 millions de dollars), Pepsico (1,7 million de dollars), Nestlé (1,2 million de dollars), Coca-Cola (1,1 million de dollars), Syngenta (1 million de dollars), General Mills (1 million de dollars), Del Monte, Kellog, Kraft, Heinz, Mars, Cargill, etc, etc.[1].

C'est alors que les consommateurs bios furent effarés d'apprendre qu'une centaine de compagnies proposant des aliments bios étaient en fait dans l'escarcelle du Cartel de l'agro-alimentaire ou du Cartel de l'agro-chimie et commencèrent à désélectionner ces compagnies de leur panier. Il existe même, aux USA, une application téléchargeable pour téléphones mobiles permettant de connaître l'identité de ces compagnies afin de les boycotter.[2]

 

Lire la suite sur notre-planète.info

Ajouter un Commentaire

Veuillez noter que votre commentaire n'apparaîtra qu'après avoir été validé par un administrateur du site. Attention : Cet espace est réservé à la mise en perspective des articles et vidéos du site. Ne seront donc acceptés que les commentaires argumentés et constructifs rédigés dans un français correct. Aucune forme de haine ou de violence ne sera tolérée.


Code de sécurité
Rafraîchir