29.04.2015 - Bienvenue dans la 'Nouvelle Médiocrité' d'un monde qui croule sous la dette

Par Ambrose Evans-Pritchard, The Daily Telegraph, 22 avril 2015

La bande-annonce pour le forum des finances publiques du Fonds Monétaire International sur « l'économie de la dette » joue sur nos peurs avec la tension obsédante d'un film de Hitchcock. Une citation de Thomas Jefferson clignote sur l'écran en lettres rouge-sang : « Nous ne devons pas laisser nos dirigeants nous charger avec la dette perpétuelle ».

Nous apprenons que la dette publique des économies riches a chuté, passant de 214% du PIB à la fin de la Seconde Guerre mondiale à 29% en 1973, une époque bénie que nous avons laissée loin derrière nous.

Depuis, le poids de la dette a grimpé à un rythme soutenu de 2% par an, s'accélérant dans une spirale ascendante pour atteindre 105% du PIB après le crash de Lehman. C'est comme si nous avions connu une autre guerre mondiale.

Le baby-boom et la forte croissance de la main-d'ouvre nous ont permis de sortir de la dette par le haut dans les années 50 et 60, sans même nous en apercevoir. Rien de tel ne semble à notre portée aujourd'hui.

Le rapport du FMI sur la Perspective économique mondiale décrit une planète prostrée prise au piège d'une croissance faible, alors que la population vieillit dans tout l'Hémisphère nord, et que la productivité connaît des ratés. Mais ce malaise n'est pas confiné à l'Ouest. Le taux de fécondité s'est effondré en Extrême Orient. La main-d'ouvre chinoise se réduit de 3 millions de personnes chaque année.

Ce rapport met en garde sur une « réduction persistante » du taux de croissance mondiale depuis la Grande Récession de 2008-2009, sans le moindre signe pour l'instant d'un retour à la normale. « Une croissance potentielle plus faible rendra plus difficile la réduction des ratios élevés des dettes publiques et privées», dit ce rapport.

Christine Lagarde, la directrice générale du FMI, appelle cela la « Nouvelle Médiocrité ». Le summum de l'élégance, comme toujours, apparemment inépuisable, tandis qu'une cour d'admirateurs se presse autour d'elle au siège du FMI à Washington. Lagarde a été à dure école pour comprendre que quelque chose est sacrément en panne dans le monde.

Le douloureux rituel de son mandat au FMI a consisté à admettre à chaque réunion que les prévisions précédentes étaient trop optimistes. Il y a d'abord eu la crise de la dette en Europe. A présent, c'est la Chine, le Brésil, la Russie et une foule de mini-Brics qui ont atteint les limites d'une croissance facile pour rattraper leur retard.

Cette année, la malédiction a été finalement rompue. Il n'y aura pas de réajustement à la baisse. Le FMI croise les doigts pour que la croissance mondiale se maintienne à 3,5% en 2015.

Pourtant, le message sous-jacent du FMI est que les ratios vertigineux de la dette et les populations âgées constituent un mélange dangereux, prédisposant la planète aux maladies « japonaises » de la déflation et de l'atrophie. Les amortisseurs monétaires et budgétaires sont largement épuisés. Les autorités n'ont plus grand-chose dans leur arsenal politique pour combattre le prochain ralentissement lorsqu'il se produira.

Bien sûr, il reste une façon consacrée par l'usage de se débarrasser des dettes non-remboursables et d'effacer l'ardoise. Cela s'appelle faire défaut. Quelques esprits malicieux au FMI ont choisi de terminer la bande-annonce hitchcockienne par une citation assassine, celle-ci de la poétesse et romancière canadienne Margaret Atwood, construite de façon bizarre mais lapidaire à sa manière : « Et puis, il y a la vengeance qui arrive lorsqu'ils ne sont pas remboursés ».

Cela pique au vif, car c'est plus ou moins ce qui pourrait arriver dans les semaines à venir si une Grèce en colère - mécontente d'avoir été sacrifiée pour sauver les banques européennes en 2010 - devient le premier pays développé à ne pas honorer un paiement dû au FMI, et peut-être le premier pays d'une longue liste de nations endettées à inverser les rôles vis-à-vis de ses créanciers étrangers. Athènes est là où tout commence. George Osborne [le ministre britannique des finances] a dit que l'idée d'une débâcle grecque était sur toutes les lèvres lors de la réunion de printemps du FMI, cette année. « L'humeur est notablement plus sombre, et il m'apparaît maintenant clairement qu'un faux-pas ou un mauvais calcul par un camp ou un autre pourrait facilement renvoyer les économies européennes à la sorte de situation périlleuse que nous avons connue il y a trois ou quatre ans. Il semble que la crise arrivera en mai », a-t-il dit.


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