13.04.2015 - Un peu de politesse, bordel !

Les Québécois sont-ils des rustres ? L’actualité récente donne à penser que le savoir-vivre fout le camp au Québec.

Un automobiliste enragé a brandi une scie à chaîne devant une famille à Saint-Jérôme. Des animateurs de radio ont dénigré une jeune manifestante de Québec blessée à la bouche par la police. Dans les classes, les enfants-rois se moquent des enseignants. Prenez le métro et vous verrez à coup sûr une femme enceinte forcée de se tenir debout sans que quiconque lui cède son siège. N’oublions pas non plus le légendaire manque de courtoisie des automobilistes québécois.

Bref, on a parfois l’impression de vivre dans une curieuse époque. L’impression, aussi, que c’était mieux dans le bon vieux temps. Que les gens savaient vivre, dans l’ancien temps.

Laurent Turcot sourit quand on lui parle du manque de politesse des Québécois. Ce professeur d’histoire vient de publier Une histoire de la politesse au Québec (Septentrion), un ouvrage collectif qui raconte les hauts et les bas du savoir-vivre en ce pays. Oui, on vit un cycle trouble en matière de bonnes manières, convient-il. Des signaux montrent que l’impolitesse se faufile partout dans nos vies. Mais ça ne veut pas dire qu’on est moins respectueux qu’autrefois, insiste le professeur. Chaque époque connaît ses épisodes d’incivilités.

 

Chacun pour soi

Depuis le tournant des années 2000, l’individualisme prend le dessus sur le bien commun, explique Laurent Turcot, attablé dans un café du quartier Villeray, à Montréal. On pense à soi, on se fout des autres. On laisse pitou faire ses besoins sur le trottoir et on oublie de ramasser, on laisse la vieille dame traverser toute seule les six voies du boulevard René-Lévesque, on vide le cendrier de la voiture dans le stationnement du centre commercial…

On peut même considérer la corruption, la collusion et l’évasion fiscale comme une forme « d’impolitesse extrême », fait remarquer Laurent Turcot. Signe des temps, la police et les gouvernements ont réagi en créant des escouades spéciales chargées de démasquer les coquins (comme l’Unité permanente anticorruption et les commissions Charbonneau et Bastarache, entre autres).

« Ajoutez à cela qu’au plan politique, on assiste à une judiciarisation des comportements soi-disant déviants », ajoute le professeur titulaire de la Chaire de recherche du Canada en histoire des loisirs et divertissements. Les itinérants écopent de contraventions pour avoir flâné sur la voie publique, pour être restés trop longtemps sur le même banc de parc. Et le règlement P-6, bricolé en toute hâte durant le printemps étudiant de 2012, permet à la police de donner une amende de 640 $ aux manifestants jugés trop dérangeants.

Les gouvernements donnent rarement l’exemple en matière de civisme, note Laurent Turcot : ils recourent abondamment au bâillon pour faire adopter leurs projets de loi (pas très poli de museler l’opposition en coupant court aux débats parlementaires). Et certains élus, appuyés par des animateurs de radio populistes, ont l’insulte facile.

 

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