14.10.2018 - Alternance inédite au Québec : l’identité sonne le glas de la souveraineté

Pour la première fois, la formation Coalition avenir Québec (CAQ) menée par François Legault remporte les élections provinciales québécoises. Le géopoliticien Adlene Mohammedi revient sur le résultat de ces élections, assez mal comprises en Europe.

Les premiers commentaires relatifs à ces élections québécoises du 1er octobre étaient déconcertants : une formation «populiste» aurait réussi à évincer les libéraux, un peu comme Donald Trump aux Etats-Unis. En France, Marine Le Pen a cru devoir féliciter avec enthousiasme le nouveau Premier ministre du Québec, en rappelant sa «fermeté face au défi migratoire», mais l’intéressé, François Legault, a rapidement rejeté toute association avec le Rassemblement national français.

Non, ce n’est pas une vague populiste qui vient de déferler sur le Québec. Et ce n’est certainement pas une victoire du nationalisme québécois. Non, cette victoire écrasante de la Coalition avenir Québec (CAQ, 74 sièges sur 125) rappelle surtout les succès en France d’En Marche et d’Emmanuel Macron. C’est la victoire de l’extrême centre et du consensus néolibéral. Le parcours professionnel et politique de François Legault suffit à le montrer. Un parcours d’homme d’affaires et d’ancien ministre connu pour son «pragmatisme».

Fondateur de la compagnie aérienne Transat, François Legault a commencé sa carrière politique dans le camp souverainiste, au Parti québécois (PQ), classé plutôt à gauche. Trois ans après l’échec du référendum de 1995, il entre au gouvernement comme ministre de l’Education (1998-2002), puis ministre de la Santé (2003). En 2008, il prend ses distances avec son parti et déclare qu’il serait préférable de faire campagne désormais sur des dossiers précis (l’économie, l’éducation, la santé) plutôt que sur la question nationale (la souveraineté). Il quitte la politique un an plus tard, avant de refaire surface avec une nouvelle formation politique créée avec d’autres hommes d’affaires : la CAQ. En 2012, la CAQ obtient 27% des suffrages et s’affirme comme le troisième parti du pays.

Ersatz identitaire et éviction du souverainisme

En 2012, c’est bien le Parti québécois qui remporte les élections avec 31,95% des voix et 54 sièges (sur 125). Le PQ forme alors un gouvernement minoritaire et Pauline Marois devient la première femme Premier ministre. A défaut de débat sur la souveraineté, qui est la raison d’être de ce parti, le PQ a préféré se lancer dans le projet d’une Charte des valeurs québécoises qui a surtout divisé la société autour de l’islam et des signes religieux ostentatoires. Un projet qui contribue à la défaite du PQ en 2014 et à la victoire du Parti libéral du Québec (PLQ), plus ouvert au multiculturalisme canadien. François Legault promet aujourd’hui un projet analogue.

Depuis 2012, les souverainistes du PQ ont connu une chute vertigineuse. Le PQ n’est plus aujourd’hui que la quatrième formation politique du pays avec à peine neuf sièges, derrière Québec solidaire, formation souverainiste de gauche radicale qui a réussi à obtenir 10 sièges. Ce n’est évidemment pas seulement à cette «Charte des valeurs» que ce grand parti, qui a contribué à réformer le Québec et qu’il a emmené aux portes de l’indépendance en 1995, doit sa chute. La raison est en réalité élémentaire : le Parti québécois a suivi le conseil de François Legault et a renoncé à parler de souveraineté et d’indépendance. Un parti qui a honte ou qui a peur d’aborder la question qui justifie son existence finit irrémédiablement par perdre toute crédibilité : le dernier chef du PQ voulait reporter le référendum sur l’indépendance à un mandat ultérieur, hypothèse à laquelle le résultat effarant du PQ donne un caractère hélas comique.

Lire la suite sur rt.com

Ajouter un Commentaire

Veuillez noter que votre commentaire n'apparaîtra qu'après avoir été validé par un administrateur du site. Attention : Cet espace est réservé à la mise en perspective des articles et vidéos du site. Ne seront donc acceptés que les commentaires argumentés et constructifs rédigés dans un français correct. Aucune forme de haine ou de violence ne sera tolérée.


Code de sécurité
Rafraîchir