Alain Deneault publie plus rapidement que je n’arrive à le lire. Interrogé sur le moteur de cette activité incessante, il a tout bonnement admis que la haine et la hargne du silence complice ambiant le poussaient à poursuivre sa lutte, donnant ainsi raison à Genet : « Ce qu’il nous faut, c’est la haine. D’elle naîtront nos idées ». Voilà qui est rafraichissant : un intellectuel qui écrit avec sa colère.
Sa plaquette Politiques de l’extrême centre, où s’entremêlent les considérations philosophiques, économiques et civiques sur la « gouvernance », la « médiocratie » et « l’escroquerie légalisée » des paradis fiscaux, vient chapeauter ses précédents essais.
L’extrême centre, c’est le refus de la délibération politique et la mise hors circuit de la pensée au profit d’un consensus, fabriqué et entretenu par les puissants, qui fait accepter l’inacceptable en présentant les choix politiques néolibéraux pour des fatalités.
Ces puissants s’assurent d’avoir des universitaires, des « experts », et des « communicateurs » en quantité suffisante pour donner une touche de respectabilité et de scientificité à ce lot de balivernes.
Les médias diffusent des vulgarités qui cachent une pauvreté d’idées. Le « gros bon sens » et l’appel « à la majorité silencieuse » sont le gage de leur légitimité et de leur respectabilité. Le plus souvent, les intervenants monologuent ou, pis, s’écoutent répéter la même opinion.
Tout ce beau monde fait passer pour des extrémistes ceux qui remettent en cause cette logique au nom de valeurs fondamentales tenues pour ringardes, comme l’équité, la décence, le bien commun et la solidarité.
Ce déni du politique se remarque dans tout le spectre politique tant les partis et les mouvements se disputent davantage les symboles et les rouages du pouvoir que les fondements mêmes du politique. Se définir autrement que « libéral », au sens philosophique du terme, est pratiquement impensable, selon Deneault : des libertariens aux libertaires, c’est toujours sur l’échelle du libéralisme que l’on se qualifie, comme s’il s’agissait de la seule philosophie politique possible au 21esiècle.
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