Gilles verrier
Commençons par le commencement. Pour le journaliste Patrick Bellerose, une demande faite en vertu de la Loi d'accès à l'information vient d'aboutir sous la forme inusitée d'un document qui lui aurait été remis par "un citoyen qui souhaite demeurer anonyme".
Coulage "autorisé" ou non autorisé d'un document ?
Citation :
« Ces nouvelles révélations se trouvent dans une réponse à une demande d’accès de 78 pages remise à notre Bureau parlementaire par le candidat à la chefferie du Parti québécois Frédéric Bastien. Obtenue à la suite d’une contestation de 13 ans, elle lui a été confiée par un citoyen qui souhaite demeurer anonyme. »
Si Frédéric Bastien a obtenu cette information de source anonyme et privée, dans ce cas la demande d'information serait toujours officiellement pendante, il aurait choisi la course à la chefferie pour sortir cette munition dont il était le seul à connaître l'existence. Encore une fois, il fait preuve d'une approche offensive envers le régime fédéral qui le distingue des autres candidats à la chefferie, lesquels n'ont pour toute opposition au régime que des paroles et la promesse d'un grand soir.
Mais Frédéric Bastien ne manque pas à son tour d'une certaine naïveté :
«Ce qui se passe dans la chambre à coucher des citoyens, ça ne regarde pas l’État», dénonce Frédéric Bastien en paraphrasant Pierre Elliott Trudeau, alors premier ministre du Canada », écrit Patrick Bellerose.
Les services secrets, qui se confondent avec ce qu'on appelle sommairement l'État profond, ne montent-ils pas des dossiers sur tout ce qui bouge, y compris Julie Payette ? Et s'il y avait un dossier à l'époque au nom de René Lévesque, il y en a sans doute un aujourd'hui au nom des prétendants à la chefferie du PQ. Ces dossiers sont gardés en réserve pour accumuler des moyens de faire chanter, de neutraliser, en somme de tenir par les cojones ceux que l'ordre établi pourrait considérer comme menaçants. Ou simplement pour encourager la fausse opposition, une opposition construite comme une machine à décevoir, qui recycle sans cesse ses propres illusions. N'est-ce-pas ce qu'a été effectivement le PQ depuis sa fondation ?
À l'instar des trois autres en lice, la réflexion de Frédéric Bastien sur le sujet demeure bien insuffisante.
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Si courir la galipotte ne soulève plus beaucoup d'indignation, comme c'était encore le cas en 1972, aujourd'hui les nouvelles frontières de la transgression se sont déplacées vers d'autres horizons comme la pédophilie et d'autres pratiques décadentes.
Les services secrets ne se priveront pas de monter des dossiers adaptés aux nouvelles réalités et, au cas où la réalité n'irait pas assez vite, ce sont les services eux-mêmes qui pourraient se charger de la fabriquer.
Au-delà de la situation particulière du Canada, qui n'est particulière que pour une opinion publique que l'on entretient dans l'illusion de l'indépendance des services de renseignements fédéraux, un examen plus approfondi nous apprend que ceux-ci sont parfaitement intégrés dans l'organisation des services secrets anglo-saxons, connue sous le nom des Five Eyes. Dirigé par les États-Unis, nous avons vu récemment ce qui apparaît comme une mise en œuvre du dispositif Five Eyes, avec l'arrestation au Canada de Meng Wanzhou à Vancouver en 2018, pour une cause qui regarde les États-Unis. Une affaire dont une version simplifiée a été abondamment reprise par les médias de masse qui se gardent de questionner la dépendance du Canada envers un système centralisé de renseignements qu'il ne contrôle pas.
Mais passons au niveau supérieur. Quant on songe à la fabrication délibérée d'une réalité politique inédite de par sa dimension, nous vient tout de suite à l'esprit Jeffrey Epstein. Pour ceux qui ont suivi l'affaire, un atout du Mossad avec son Lolita express, son île privée et ses maisons closes à Paris, New York et ailleurs : une organisation bien huilée pour compromettre et manipuler des personnages bien en vue de ce monde, au profit d'un nouvel ordre mondial du banditisme (NOMB). Le même phénomène de corruption des élites, avec en son centre la pédophilie et le détournement de mineurs des deux sexes, se retrouve dans le « pizzagate ». Dans ce deuxième cas, une corruption organisée de hauts placés sur lesquels on détient des preuves de comportement immoral, appuyées par des photos compromettantes, à l'identique de l'affaire Epstein.
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Revenons dans notre précarré. Faire l'autruche sur le déplacement des plaques tectoniques est une obligation pour toute opposition qui veut demeurer dans les cadres de la respectabilité politique et médiatique. Ce qui en fait une semi-opposition qui refuse de prendre la pleine mesure des dérives de notre temps. Reconnaissons à Frédéric Bastien de se distinguer par une pugnacité encourageante à certains égards. Mais faute de faire les grandes synthèses de l'expérience du PQ et de la relier à l'état des lieux à l'échelle mondiale, il consent aux compromis à faire pour éviter son exclusion médiatique. Il fait son lit dans une opposition auto-contrôlée, une caractéristique de ses prédécesseurs et modèles politiques du PQ.
Pour aller plus loin, si ses chances d'être élu devenaient sérieuses, s'il devenait une vraie figure montante, ce qui est peu probable à ce stade, on lui demanderait de dénoncer les plus déterminés et les « complotistes », dans son entourage, comme le fait déjà Mathieu Bock-Coté, un appui de Bastien, qui suit la ligne d'une carrière internationale bien incrustée.
Ce topo ne permet pas de traiter la question en détail, mais la lutte constitutionnelle que propose Bastien, pour avoir du potentiel, n'est pas un bien en soi. Les contestations constitutionnelles, comme à mon sens le combat en défense de la loi 21, restent des luttes « dans le régime » au sens séguiniste du terme, et au-delà une lutte entre deux régimes avant d'être un combat nationaliste. Il faudra y revenir.