02.11.2016 - L’entente qui pue au nez des fromagers d’ici

Les propriétaires de la fromagerie Au gré des champs disent que l’entente Canada-UE signe l’arrêt de mort de plusieurs artisans

« Vous voulez en voir des campagnes où il n’y a plus rien ? Les petites fermes comme nous, avec une trentaine de vaches, il y en a déjà beaucoup d’abandonnées. Et il va y en avoir encore plus ! »

Les fromagers Daniel Gosselin et Suzanne Dufresne en ont contre l’accord de libre-échange entre le Canada et l’Europe. « Les gens ne réalisent pas ce que ça veut dire, ces 17 700 tonnes de fromages européens qui vont pouvoir être vendues ici ! C’est simple : c’est comme si 1000 fromagers de notre taille ouvraient tous d’un coup au Québec ? »

Combien y a-t-il de fromageries québécoises de la taille d’Au gré des champs, leur fromagerie installée non loin du mont Saint-Grégoire ? « Une soixantaine… »

C’est simple, croit Daniel Gosselin : plusieurs vont devoir abandonner. « Quand il n’y aura plus de vaches, plus d’étables, ça va être un désert rural que vont visiter les fins de semaine les gens de la ville. Je peux vous en montrer beaucoup déjà des fermes où il n’y a plus rien depuis vingt ans. On va cultiver du soya et du maïs, et ce sera tout. Ce sera le désert. »

À la Ferme des belles prairies, là où est installée la fromagerie Au gré des champs, Daniel Gosselin affirme travailler entre 60 et 80 heures par semaine, comme bien d’autres agriculteurs. Il entretient des bâtiments, de la machinerie, un commerce, des espaces de pâturages, d’autres pour les foins, des haies naturelles aussi. « C’est la ferme familiale. On a été élevés ici. Mon père l’a achetée en 1950. Ma fille Marie-Pierre veut la reprendre, avec un projet pour améliorer encore la condition des animaux grâce à un nouveau bâtiment où les vaches ne seraient plus attachées. On est une ferme bio. Le bien-être animal, c’est important pour nous. Contrairement à l’Europe, il n’y a pratiquement pas de subventions pour favoriser le bien-être animal. Est-ce qu’on va pouvoir construire une étable de 500 000 ou 700 000$ sans subvention avec ce qui arrive ? »

Danielle Gosselin est un des administrateurs de l’Association des fromagers artisans du Québec (AFAQ). Au comptoir de vente attenant à sa ferme, il propose d’ailleurs les fromages d’autres producteurs québécois ainsi que des produits du terroir.

La valse du lait

Pour réaliser ses fromages, la fromagerie Au gré des champs utilise sa propre production laitière. Mais les dispositions des Producteurs de lait du Québec (PLQ) l’obligent à vendre d’abord son lait à l’association qui le lui revend ensuite… plus cher ! C’est une opération strictement comptable puisque le lait, en ce cas précis, ne quitte même pas la ferme de la famille Gosselin. « On me paye un prix pool », c’est-à-dire un prix moyen compte tenu des qualités du lait produit.

En juin dernier par exemple, la ferme était payée 80,63 $ l’hectolitre, mais payait 84,10 $ l’hectolitre pour avoir le droit de transformer son propre lait. Sur une production annuelle de 200 000 litres, cela compte, explique Daniel Gosselin. « En clair, ça veut dire que si je ne transforme pas mon lait, je meurs. »


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