24.05.2017 - « Tuerie » pour animaux, souffrance des travailleurs : « Il faut briser l’omerta qui règne dans les abattoirs »

A quoi ressemble le quotidien des ouvriers qui travaillent dans des abattoirs industriels ? Le journaliste Geoffrey Le Guilcher s’est fait embaucher dans l’un d’entre eux, sous une fausse identité, en Bretagne. Pendant plus d’un mois, il y a découpé à la chaîne des vaches en une minute et partagé les souffrances physiques et psychiques des ouvriers. Il raconte son expérience de l’un des métiers les plus difficiles du monde industriel dans le livre « Steak machine ». Et révèle que les résistances à toute évolution, aussi bien pour la santé des salariés que pour celle des animaux, sont puissantes. Pour l’industrie, « le consommateur ne doit surtout pas faire de lien entre la vache et le steak qu’il a dans son assiette ». Entretien.

Basta ! : Vous expliquez dans votre ouvrage que l’abattage industriel a servi de modèle à l’industrie automobile. Pourquoi ?

Geoffrey Le Guilcher : Le travail à la chaîne a d’abord été mis en place dans les abattoirs américains. À la fin du 19ème siècle, 80 % de la viande consommée aux États-Unis était abattue à Chicago. C’est en observant les chaînes de dépeçage de Chicago qu’Henri Ford et ses ingénieurs ont conçu les chaînes de montage des voitures. Contrairement à l’industrie automobile, la mécanisation a atteint ses limites dans les abattoirs, car chaque animal est différent et l’on n’a pas encore inventé de robots aussi précis que l’homme.

L’environnement des abattoirs, tels que celui où vous avez travaillé en Bretagne, semble particulièrement favorable à la souffrance physique et psychique. Pourquoi ?

J’ai été jeté sur la chaîne après une semaine de formation. Et n’étant pas totalement prêt, je me démenais pour découper ma vache en une minute. Les chefs de chaîne, surnommés les « aboyeurs », sont là pour veiller à ce que le rythme des ouvriers soit respecté ou pour augmenter la cadence. L’environnement est très dur. D’abord à cause de l’odeur et de l’humidité, auxquelles il faut ajouter des écarts de température très importants. Les accidents du travail et les troubles musculo-squelettiques sont courants. Mal aux doigts, aux articulations, aux os, déchirures musculaires, lombalgies, hernies discales... La souffrance est permanente sur la chaîne à cause de la répétitivité des gestes combinée à la cadence. Mais le pire, c’est la nuit, quand on s’allonge et que le corps refroidit. Il y a également les cauchemars, nombreux dans les premiers mois, qui sont générés par la vue du sang et l’image à perte de vue d’animaux pendus à des crochets.

Lire la suite sur bastamag.net

Ajouter un Commentaire

Veuillez noter que votre commentaire n'apparaîtra qu'après avoir été validé par un administrateur du site. Attention : Cet espace est réservé à la mise en perspective des articles et vidéos du site. Ne seront donc acceptés que les commentaires argumentés et constructifs rédigés dans un français correct. Aucune forme de haine ou de violence ne sera tolérée.


Code de sécurité
Rafraîchir