dimanche, 17 juin 2018 13:21

Réapproprions-nous le débat public

Evaluez cet article
(3 vote)

VanPelt

À l’heure du contrôle total des médias dominants sur l’information, de l’intox et du conditionnement idéologique, la prudence et la sagacité sont plus que jamais de rigueur. Comprendre le piège des débats tout faits et développer un réflexe d’autodéfense intellectuel afin d’éviter les clivages voulus par le système, c’est notre proposition afin que le peuple se réapproprie son actualité. 

Les débats sur commande

Ça commence avec un seul monde et plusieurs médias. La radio, la télévision, les journaux papier et les sites internet sont comme les prismes dans lesquels la réalité va se diffuser. La Presse, Le Huffington Post, Radio Can, Le Devoir, Le Métro, TVA, Rouge FM…quant à eux, sont là pour offrir une perspective sur l’actualité qui convient à notre classe sociale, à votre sensibilité politique, à notre appartenance communautaire, etc. Et c’est merveilleux. Tout le monde y trouve son compte. Si j’aime taper sur Donald Trump, je lis La Presse, mais si je suis fatigué d’écouter une chroniqueuse hystérique m’expliquer que la liberté des femmes, ça commence par arrêter de se raser sous les aisselles, et bien, je peux toujours aller écouter Martineau et Bock-Côté râler sur les Anglos, l’islam et... …et l’islam. Bref, il y en a pour tous les goûts. Sauf que! La diversité de ce large panel de journalistes et de chroniqueurs a beau examiner la société avec une multitude de grilles politiques différentes, les sujets sont toujours les mêmes. Étrange cette uniformité de l’information malgré tant de médias contradictoires! 

C’est que le journalisme est contenu dans un cadre dont les limites idéologiques et politiques sont définies d’avance par le système. Une fois les limites de ce cadre franchies et ce n’est plus un média légitime ni un journaliste sérieux ...tout juste un organe de propagande et un sbire radicalisé.

Nous comprenons alors que ce que proposent les médias de masse n’est pas une actualité diverse, mais des points de vue divers sur une seule et même actualité. 

L’appareil médiatique dominant lance des sujets en pâture à l’ensemble des charognards de la presse traditionnelle qui s’engagent alors dans une spectaculaire lutte pour l’audimat. Il définit ce qui est sujet à controverse, ce qui est matière à débat et surtout, il définit les antagonismes.

L’objectif des agents de propagande du système n’est plus de reconstituer la réalité dans son infinie complexité, mais plutôt d’exercer un pouvoir de contrôle sur la population. Distiller sa philosophie, censurer les analyses subversives et diviser la population sont des pratiques monnaie courante. C’est ainsi qu’au rythme des articles tapageurs, on invite des individus déjà isolés les uns des autres à se positionner dans des débats clivants. Un jour sur le crucifix de l’Assemblée, le lendemain sur le voile, puis sur les brassières et, le jour d’après, sur le dernier tweet de Donald Trump. Pendant une semaine, l’ensemble de l’attention collective peut être monopolisé par une seule controverse, comme si rien d’autre n’existait ou comme si rien digne d’attention. Or, tout pourrait être différent : nous pourrions avoir quinze journaux différents publiant chacun une controverse différente. 

Le plus regrettable, c’est que non seulement ces débats sur commande occulteront l’immense majorité des évènements dignes d’intérêt, mais qu’après la semaine de tapage médiatique, ils n’auront pas fait progresser la compréhension que nous avons du sujet et auront divisé davantage la population.  

La nécessité du métadébat

Comment éviter le piège tendu par l’appareil de propagande du système et la division?

Pour commencer, il faut accepter le fait qu’un média ne peut pas être neutre. Pour cela, il faut comprendre la différence entre les faits rapportés et le sujet traité : un article peut être très objectif et impartial dans sa façon de rapporter des faits, mais il ne peut jamais l’être dans le choix de l’évènement qu’il choisit de couvrir. Dès lors, nous pouvons en déduire que tous les médias choisissant de traiter un même sujet au même moment le font pour des raisons semblables et dans un seul et même intérêt. 

Dans ces circonstances, le seul véritable antagonisme qui puisse exister entre médias aujourd’hui est celui qui oppose l’infosphère et la réinfosphère. Cette dernière a le mérite d’énoncer clairement ses partis pris :





Il ne s’agirait pas pour autant de s’enfermer dans l’un ou dans l’autre : comparer l’un et l’autre reste encore le moyen le plus facile de se forger une opinion fiable et personnelle.

Par exemple, l’actualité de 2018 a été marquée par la controverse autour du voile de Sondos Lamrhari, jeune étudiante québécoise d’ascendances marocaines - donc PAS marocaine! Petit rappel pour les gens qui ne connaitraient pas la différence entre «être d’origine» et «avoir des origines» - voulant intégrer la SPVM. Tous y sont allés de leur petit commentaire[1][2][3] jusqu’à MBC nous parlant d’«intégrisme».



Au même moment, LBDP et le courageux Michael Lauzon partaient tourner un reportage sur une autre forme d’intégrisme perpétrée, elle, par les officines d’une communauté apparemment vaccinée contre la polémique.

 

 

Attention!!! Si vous pensez que je suis en train de légitimer le port du voile dans la police montréalaise, c’est que vous vous éloignez du propos. Légitimer un acte condamnable par un autre acte condamnable relève du sophisme. Je ne m’intéresse pas au voile ici, mais de la couverture médiatique sur le voile. Nuance! 

Ne plus céder aux injonctions des médias qui nous poussent à prendre position dans des débats préfabriqués et nous questionner plutôt sur le bien-fondé d’une telle polémique, voilà ce que j’appelle un métadébat : un «débat qui débat du débat». 

«Pourquoi nous parle-t-on de ça?», «Pourquoi maintenant?», «Qui a mis ce sujet sur la table?», «Dans quel intérêt?», «Qui est-ce que ça concerne?» et «Y a-t-il des antécédents?», voilà le type de question que les plus sagaces se posent et voilà précisément où commence votre processus d’émancipation. 

Comparons les articles, replaçons les évènements dans leur contexte, identifions les acteurs derrière la publication des articles de la grande presse et comprenons les enjeux politiques derrière ces controverses bidon, désacralisons l’opinion de ceux qui dominent la tribune, cessons de voir notre propre société par la lorgnette étroite des médias dominants et nous, le peuple, serons à nouveau maitres de notre histoire. 



[1] http://www.journaldemontreal.com/2018/04/12/determinee-a-etre-policiere-et-a-conserver-son-voile

[2] https://urbania.ca/article/des-femmes-voilees-en-uniforme-du-spvm-ouin-pis/

[3] http://www.tvanouvelles.ca/2018/04/04/hijab-et-turban-au-spvm-nalimentons-pas-de-controverse-inutile

Ajouter un Commentaire

Veuillez noter que votre commentaire n'apparaîtra qu'après avoir été validé par un administrateur du site. Attention : Cet espace est réservé à la mise en perspective des articles et vidéos du site. Ne seront donc acceptés que les commentaires argumentés et constructifs rédigés dans un français correct. Aucune forme de haine ou de violence ne sera tolérée.


Code de sécurité
Rafraîchir