lundi, 18 decembre 2017 12:50

Révision de l´histoire autour d´une pendaison de crémaillère

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Note de Gilles Verrier : Le 16 novembre 1885, Louis Riel était pendu. La société du spectacle n'ayant aucune pudeur à transformer tout en marchandise, le Canada lui consacre un timbre poste. Une récupération qui se fait du coté fédéraliste. Mais aussi du coté nationaliste BCBG qui répugne à rappeler l'importance de la foi catholique chez Riel, de même que son attachement charnel aux valeurs de la Nouvelle-France, toujours vivantes 115 ans après la conquête. Quelques heures avant le 134è anniversaire de la pendaison de Louis Riel, voici à lire un texte bien senti, qui dans une rugosité populaire s'oppose sans ménagement à la récupération d'un combattant pour en faire une icône inoffensive. Commémorer Riel, c'est bien sûr se rappeler, comme le fait le timbre poste du Canada, mais c'est surtout et impérativement revendiquer la riche dimension continentale et néo-française de notre identité.

Lionel Rumilly

Histoire du Québec : fausse image de nous-mêmes ?

Jacques  Ferron, sorte d'anachiste érudit qui refusait de lire l'histoire avec des lunettes politiciennes (Dieu qu'il a dû se rendre malheureux!), écrivait  : « Le Québec s'est défendu comme il a pu, usant de moyens subtils dont le meilleur fut de donner au monde et au reste du Canada de fausses images de lui-même. Ce moyen avait des inconvénients, en particulier celui de nous mystifier nous-mêmes. »   L'histoire nationale utilisée comme un combat a en effet certains défauts dont celui d'utiliser la récente doctrine en vogue pour en parler. Cela crée parfois des affabulations ou des distorsions de la réalité assez étonnantes. À titre d'exemple et à l'occasion de l'anniversaire de la pendaison de Louis Riel (le 16 novembre dernier), occasion que j'ai moi-même saisie pour déboulonner quelques mythes (1), nous avons pu le vérifier dans le Journal de Montréal et sur le site Vigile.net, deux sites qui aiment pourtant montrer une orientation nationaliste.

Les matantes qui protègent leur petit-louis Riel tout beau, tout gentil, tout laïc

Madame Houda Pépin, dans le Journal de Montréal, fait l'apologie de Louis Riel sans même mentionner la religion qui guidait ce dernier, bien au-delà, du fait français en Amérique (2). Même chose chez Vigile.net (3) où Madame Morot-Sir ne touche aucunement à l'aspect mystique que Riel semblait vouloir se donner et ne mentionne son catholicisme que comme un détail de l'histoire.

La réalité est pourtant tout autre. L'aspect mystique que Riel voulait se donner compte pour beaucoup dans le calcul politique. Aurait-il perdu l'appui du clergé dans sa rébellion s'il n'avait pas prêché sa propre théologie à ses partisans?. S'il n'avait pas rebaptiser les jours de la semaine? S'il n'avait pas fait du samedi le jour du Seigneur comme dans la loi de Moïse? S'il n'avait pas proposé de nommer un nouveau pape (Bourget et, par la suite, Taché)? S'il n'avait pas rejeté l’autorité de Rome et suggéré que, dans un catholicisme réformé, tout le monde serait prêtre ?

Riel victime de John le terrible ?

Dans la même veine, Madame Morot-Sir et Madame Houda-Pépin ne mettent que très peu en contexte la citation de John A. MacDonald : « Tous les chiens auront beau aboyer au Québec, Riel sera pendu ! ». Ont-elles lu autour de la question ou autour du personnage de MacDonald ? Savent-elles seulement que les élites canadiennes-françaises de ce temps ne le vouaient pas aux gémonies et qu'elles sont d'une manière ou d'une autre les héritières de ces élites canadiennes-françaises qui n'appuient des politiciens que par arrivisme ? Éloignez-moi l'idée de prendre la défense d'un père fondateur du Canada, mais si l'information n'est pas divulguée, comment se faire une idée juste de la chose ? La pensée de MacDonald est simple : avant d'agir, il se pose la question de savoir quelle position politique lui octroiera le plus de votes possible?  Gracier Riel allait lui faire perdre de précieux votes : il n'intervient donc pas. La vérité est que Riel se fit pendre en échange d'appuis politiques. Le cynisme, sinon le zèle démocratique, en est bien sûr à son paroxisme, mais MacDonald n'a fait que jouer le jeu qu'impose le respect de la démocratie parlementaire. Même au Parlement de la Province de Québec, avant la pendaison de Riel, les motions proposées par Arthur Turcotte et Honoré Mercier dénonçant la « négligence » du gouvernement fédéral exaspérant les métis furent repoussées par 41 voix contre 15. Autrement dit, c'est le système démocratique et l'affairisme qui l'accompagne immanquablement qui est à blâmer. C'est le fait que les dés idéologiques et d'intérêts personnels soient pipés d'avance lors des votes d'assemblées qui est à blâmer. C'est, comme la nommait Groulx, « la tour de Babel de 1867 » qui est à blâmer. C'est le fait qu'il y ait une Constitution, mais que personne ne la respecte et qu'elle est réalisée pour que rien n'y soit respecté. La conception de la démocratie que se font Mesdames Morot-Sir et Houda-Pépin est digne de conte pour enfant avec les gentils démocrates d'un côté et les vilains Anglais de l'autre. Celui qui respecte la véritable démocratie avec le plus de scrupule, en y acceptant la laideur, c'est MacDonald, pas Riel.

Riel, canadian hero... ça sonne bien non ?




Dénoncer MacDonald et se faire le chantre de la démocratie ensuite demande une affabulation digne de conte pour enfant (surtout quand l'on connait les expertises historiques respectives de Mesdames Morot-Sir et Houda-Pépin). Mais faire de Riel, cette égérie de l'anti-gouvernement canadien tel qu'il est devenu aujourd'hui (sauf sur le multiculturalisme, Riel se faisant l'apôtre de l'idée d'un Manitoba « berceau de toutes les races », Madame Morot-Sir fait bien de le rappeler), faire d'un homme aux actions et positions anti-Canada des pères fondateurs un héros national canadien, comme le voudrait Madame Houda-Pépin, c'est une récupération politique complètement dépouillée de toute logique. Le malheur de ce type de chronique est qu'elle semble destinée à ne pas effrayer les contributeurs politiques de venir au prochain souper spaghetti ou à la prochaine pendaison de crémaillère des Chevaliers de Colomb locaux.

Laissez à Riel ce qui appartient à Riel

Laissez-le être cet ennemi du Gouvernement canadien, ce pirate filou, ce mangeur d'Orangistes, ce pendeur d'Anglais (même s'il n'en a fait pendre qu'un seul), cet ignoble français, ce fou de Dieu, cet étrange personnage que Wilfred Laurier (son principal défenseur parmi les parlementaires canadiens) ne trouvait bon qu'à être placé à l'asile psychiatrique. Arrêtez de faire de la politique de matante, enlevez votre flegme d'anglais, laissez-lui ces jouets d'homme. Quand vous titrez Madame Morot-Sir « Louis Riel, souvenons-nous de ton nom qui nous parle de liberté », vous m'enlevez le goût d'être libre tellement le texte qui suit confine Riel à un cadre régide et sans vie, comme si Riel avait vécu des aventures de vieille fille vertueuse, laconique, pieuse, victime de tout ce qui lui arrive. Votre culte de Riel est aussi aventureux que l'apprentissage par coeur du Code Civil. Je me doute bien que vos souvenirs de Riel représentent assez peu les palpitations d'une nuit au Fort Garry vécue dans l'attente de piéger, de repousser, de tuer des Orangistes assoiffés de sang ! 

Qui s'intéressera, autre que les âmes mortes, à un  simple défenseur des droits de l'homme jugé injustement par des Anglos-protestants qui ne parlaient pas français et avec qui Riel n'a jamais été en guerre ?

Riel et la lutte métisse ne se résume pas qu'à une lutte de droit

En faire le récit à votre manière Mesdames vous octroierait un A+ et un bel autocollant sur votre cahier Canada, comme à la petite école. Vous devez être fières. Vous passez le cours avec mention !... tout est bien qui finit bien. On peut mourir en paix. Mission accomplie. Les Canadiens français vaincront... survivront... s'éteindront... Et une pendaison de crémaillère pour célébrer ça, non ?!



(1) http://www.lebonnetdespatriotes.net/lbdp/index.php/dossierslbdp/item/16141-les-suites-de-laffaire-riel-entre-soumission-%C3%A0-l%E2%80%99angleterre-et-soumission-aux-%C3%A9tats-unis 

(2) http://www.journaldemontreal.com/2017/11/16/pour-la-rehabilitation-officielle-de-louis-riel

(3) https://vigile.quebec/articles/louis-riel-souvenons-nous-a-jamais-de-ton-nom-qui-nous-parle-de-liberte

(3) https://vigile.quebec/articles/novembre-2017-n-oublions-pas-louis-rie

Commentaires   

 
0 #2 L. Rumilly 17-11-2019 17:59
@Nominoma :l'instruction est présente dans les articles placés en annotation. Un pamphlet ça va de soi n'est pas fait pour instruire. Si vous êtes intéressés à vous instruire, vous pouvez aussi me demander les ouvrages à consulter... mais bon, comme ça ne vous est jamais venu à l'esprit, je doute que ce soit possible de vous instruire. Pour le reste, décevoir les gens est ma profession. Merci de me le rappeler.
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0 #1 Nominoma 17-11-2019 08:22
Article incomplet car il nous dit pas QUI était le véritable Louis Riel... il dénonce ce faux personnage... mais sans instruire. Bref, décevant.
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