lundi, 11 aout 2014 04:28

Usure à la STM

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Ray Y. Adamson

 « Malgré les défis financiers que nous aurons à relever tant sur le plan du service de la dette que sur celui du déficit d'investissement, le client demeure la raison d'être de la STM… »[i] - Philippe Schnobb

 

 

Le client demeure la raison d’être de la STM – que c’est noble et rassurant! Malheureusement, on entend un autre son de cloche en écoutant la radio le dernier mercredi de janvier. En discutant les difficultés financières de la Société de transport de Montréal, le journaliste de Radio-Canada évoque l’importance de la dette, sans toutefois mentionner des chiffres... "un impact assez difficile a assumer" voilà une déclaration étonnante en sa franchise.

Selon le budget 2014 déposé le 29 janvier 2014 par la Société de transport de Montréal[ii], le service de la dette est estimé à 143 Millions de dollars en 2014. Malgré les compressions de 65 Millions de dollars, la Société sera quand-même déficitaire. Une dépêche CNW fait état d’un budget d’austérité[iii]. Les budgets d’austérité, ce n’est pas quelque chose organisé par des anciens cadres de Goldman Sachs en Europe, notamment en Grèce et en Italie[iv]?

D’après le même budget, la « Subvention du gouvernement du Québec liée aux intérêts du service de la dette » se chiffre à 65 Millions de dollars. Le service de la dette est composé du principal à rembourser (le « capital emprunté ») et des intérêts (la « charge » de la dette). Il est donc naturel que la dette de la STM soit beaucoup plus imposante que son service – le chiffre exact demeure toutefois introuvable. La valeur de la dette n’est pas inscrite dans le budget 2014, mais se trouve cachée en petits caractères dans une note en bas de la page 77 d’un document intitulé « Dette » du budget de la Ville de Montréal pour 2013[v]. On y trouve la phrase suivante : « La dette nette de la Société de transport de Montréal passerait de 164,9 M$ en 2001 à 705,5 M$ en 2013 ». Cette phrase est précédée par l’observation (en jargon actuariel) que la croissance de la dette nette de la Société de transport de Montréal est « importante ».

Un utilisateur des transports en commun ne peut qu’être médusé en apprenant que ses coûts de transports collectifs augmentent plus de deux fois plus vite que l’inflation (3.2% versus 1.4%) [vi] malgré une baisse de service et des investissements. Sa douleur est partagée par le propriétaire d’immeuble à Montréal qui subventionne la STM à travers ses impôts fonciers[vii], le conducteur d’automobile qui paie pour immatriculer son véhicule[viii] et le contribuable québécois qui subventionne les intérêts par coups de dizaines de millions. À noter que le contribuable québécois est en fin de compte l’ultime responsable de l’obligation financière de la STM, qui dépend de l’Agence métropolitaine de transport, qui, selon la loi la régissant[ix], article 2 : « L'Agence est mandataire de l'État. Ses biens font partie du domaine de l'État mais l'exécution des obligations de l'Agence peut être poursuivie sur les biens de celle-ci. »

L’ancien conseiller municipal Michel Benoit, comptable de formation, prétendait que la dette de BIXI, qui fait faillite en ce début d’année 2014, se faisait épongér à même la marge de crédit de la Ville de Montréal[x]. Logique. On a déjà compris que les transports publics roulent tous sur la dette.

En cette période de taux d’intérêts historiquement bas il faut se demander comment la dette de la STM continue de croître malgré les compressions massives et les augmentations de tarifs. Il faut aussi se demander comment la dette évoluera lorsque les taux d’intérêts se mettront à augmenter. Ça ne prend pas une boule de cristal pour voir que (s’ils changent – et c’est juste une question de temps) les taux ne peuvent qu’aller dans une direction : vers le haut. Avec des tarifs déjà élevés, que ferons-nous lorsqu’il n’y aura plus rien à couper?

 

*Note : la dette à long terme de la STM est chiffrée à $1 940 216 000. Ce chiffre avoisinant les 2 Milliards $ est tiré du rapport financier 2012 http://www.stm.info/sites/default/files/rapfin12.pdf et il est composé d’obligations, emprunts et emprunts bancaires échéant de janvier 2013 à décembre 2032. La dette nette en 2012 était de $623 595 000 selon la même source; cela se rapproche de l'estimation pour 2013 de 705 Millions $ citée dans la note 5. La dette nette a été utilisée pour éviter de faire de la polémique.

 

image: Mike Deschamps, Le bonnet des patriotes

[i] Philippe Schnobb, président du conseil d’administration de la Société de transport de Montréal

[ii] http://www.stm.info/sites/default/files/affairespubliques/ressourcesmedias/Documents/ap_faits_saillants_budget_2014.pdf

[iii] http://www.newswire.ca/en/story/1296949/la-stm-depose-un-budget-d-austerite-et-est-toujours-en-attente-d-un-nouveau-cadre-financier

[iv] Mario Monti à la tête du gouvernement italien, Lucas Papademos à la tête du gouvernement grec et Mario Draghi à la tête de la Banque centrale européenne, pour nommer que trois anciens de Goldman Sachs.

[v] http://ville.montreal.qc.ca/pls/portal/docs/page/service_fin_fr/media/documents/budget-2013-DETTE.pdf?target=_blank

[vi] http://www.bankofcanada.ca/rates/price-indexes/cpi/

[vii] http://ville.montreal.qc.ca/portal/page?_pageid=3077,3528864&_dad=portal&_schema=PORTAL

[viii] http://www.saaq.gouv.qc.ca/immatriculation/contribution_transport_com.php

[ix] http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=3&file=/A_7_02/A7_02.htm

[x] http://www.journaldemontreal.com/2014/01/20/ce-qui-a-tout-fait-deraper

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