lundi, 01 fevrier 2016 08:36

Église VS nazisme

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Récemment, j’ai eu la chance d’assister à une conférence organisée par la section lilloise d’Égalité et Réconciliation et donnée par l’abbé Gaudray (FSSPX), portant sur la position de l’Église face à l’idéologie nazie et ayant pour but de casser les mythes populaires imposés par la doxa, consistant à diaboliser l’Église. C’est sur la base des notes que j’y ai prises et de recherches que j’ai effectuées sur internet que je peux désormais vous livrer cet exposé.

D’abord, quelques notions s’imposent. L’Église a toujours cherché à convertir les politiques et les nations, comme le rappelait très justement Léon XIII dans son encyclique Immortale Dei. Elle peut ainsi être amenée à demander de la part des États une certaine soumission sur certains sujets. Parfois, l’Église peut aussi conclure des concordats, la mettant ainsi sur un pied d’égalité avec les souverains. Ce n’est pas la solution qu’elle préfère mais une sorte de plan B : elle ne court pas après les concordats. L’action de l’Église se fait sur trois niveaux : l’enseignement, la protestation diplomatique et l’action concrète (qui peut consister en l’envoi d’aides ou l’échange d’informations).

En 1937 est publiée l’encyclique Mit brennender Sorge (« avec une vive inquiétude », en allemand dans le texte) par le pape Pie XI. Cette encyclique est écrite en collaboration avec le cardinal Pacelli, qui deviendra par la suite le pape Pie XII. Pacelli a été nonce apostolique à Munich et à Berlin de 1917 à 1929. L’encyclique est alors envoyée dans le plus grand secret à tout le clergé allemand. Les autorités allemandes ne devaient surtout pas en avoir connaissance, certains prêtres sont même allés jusqu’à la cacher dans le tabernacle pour s’assurer qu’elle ne serait pas lue par des personnes qui n’y auraient pas été invitées. L’ordre a été donné de ne la sortir et de la lire aux fidèles catholiques allemands que lors du sermon du dimanche des Rameaux. Bien sûr, la publication de cette encyclique était délicate car les allemands étaient légitimement fiers du redressement de leur pays, après tant d’années à souffrir des conditions déplorables imposées par le traité de Versailles, presque vingt ans auparavant. Le pape craignait de brusquer inutilement les allemands et a, pour éviter cela, mis en avant les évêques allemands.

Parlons un peu du contenu de l’encyclique. Pour ceux qui voudraient douter des informations que je m’apprête à donner, sachez que l’encyclique est consultable sur divers sites internet (tout comme Mein Kampf d’ailleurs). Les principales condamnations portent sur le néo-paganisme imposé à l’Allemagne, le rejet imposé de l’Ancien Testament, le culte du chef, le mythe du Sang et de la Race, le non-respect des droits de l’homme (à ne pas entendre comme la définition actuelle mais comme les droits naturels que l’homme tient de Dieu. Quelques exemples : eugénisme, enrôlements de force dans la Hitlerjugend, clercs mis à mort ou déportés, …) et la propagande anti-chrétienne. À aucun moment Pie XI ne condamne le peuple germain, dont il reconnaît la légitimité en tant que peuple. Concernant la propagande anti-chrétienne, il faut savoir qu’on estime à environ 100 000 le nombre d’apostasies de la foi catholique dont elle a été responsable pour la seule année 1937 ! La propagande nazie opposait souvent l’humilité au courage, tendant à faire croire que l’humilité était l’apanage des faibles, ou mettait en lumière les erreurs dont des hommes d’Église avaient pu, par le passé, se rendre coupables, de manière à faire l’amalgame entre l’Église en tant qu’institution et les fautifs. Le cardinal Pacelli, à l’époque, appelait les nazis « faux prophètes à l’orgueil de Lucifer ».

Pendant la guerre, l’Église n’est pas restée sans rien faire. Le 24 août 1939, le pape appelle à la paix. Elle enjoint l’Italie à ne pas entrer en guerre et, pour cela, envoie le cardinal Pacelli auprès du roi et du Duce. L’Église refuse aussi de bénir la guerre contre les bolcheviques, même si le communisme a été condamné par Pie XI dans l’encyclique Divini Redemptoris. Lors de la fête de Noël 1942, le pape condamne la « mise à mort ou la condamnation au dépérissement des personnes en raison de leur race ou de leur ethnie ».Toutefois, l’Église cherchait à éviter au maximum de provoquer le courroux des autorités nazies, ce qui pouvait avoir des conséquences désastreuses (augmentation des persécutions contre les catholiques en guise de représailles). C’est pour cette raison que l’Église a pu se montrer relativement silencieuse pendant la guerre, ce que lui reprochent aujourd’hui beaucoup de gens. Notons que s’il est aisé de prononcer des anathèmes au chaud depuis un bureau, cela l’est beaucoup moins d’en subir les conséquences dans une zone ravagée par la guerre. Enfin, il est de notoriété publique que le Vatican a aidé des juifs à échapper aux autorités nazies, on estime ainsi à 850 000 le nombre de juifs ayant échappé à la détention en camp de concentration grâce à l’action du Vatican. Cependant, Rome ne condamne pas le peuple allemand en lui-même. D’ailleurs, dans un discours prononcé le 2 juin 1945, le pape Pie XII déclare injuste la destruction de l’Allemagne par les forces alliées (on se souviendra par exemple de Dresde, détruite pour rien).

À la lumière de tous ces éléments, on peut être tenté de se dire qu’il y a aujourd’hui bien pire que les nazis. Et c’est vrai ! Notre époque voit défiler, entre autres, l’État islamique, les dictatures communistes à travers le monde, le consumérisme ambiant ou encore la démocratie imposée par la force des canons à des peuples qui n’en ont pas fait la demande expresse. Cependant, l’Église, bien qu’elle condamne ces abus, peut encore travailler un minimum et espérer aider des âmes à accéder au salut. C’est pourquoi elle ne s’élève pas de manière ostensible au quidam contre ces systèmes (en coulisses, c’est une autre paire de manches. Voir les relations tendues entre le Vatican et le régime chinois). Toutefois, cela ne doit pas nous pousser au relativisme. L’idéologie nazie est objectivement mauvaise et, après lecture des deux encycliques l’ayant condamnée (la seconde a été rédigée et publiée en 1939), il faudrait être de mauvaise foi pour déclarer que le catholicisme et le nazisme sont compatibles.

Source : francoisdemyre.wordpress.com

Commentaires   

 
0 #7 Georges Tremblay 06-02-2016 12:47
Les reproches qui sont faites envers l'Église catholique concernant cette période sont le reflet d'une ignorance du principe laïque propre à cette Église.

Les reproches sont basés sur l'absence de prise de position de l'Église sur les positions politiques des États. En fait, on reproche à l'Église catholique d'être laïque.

Il est pourtant évident que les critiques et positions exprimées par l'Église à l'État nazi ne concerne que le religieux et les droits des catholiques. Or, on ne reproche pas à l'État nazi son irrespect en matière de laïcité. L'État nazi impose en effet un mythe païen en interdisant les autres cultes.

L'Église a respecté son principe.

Ce sont les politiques qui lui reprochent sa laïcité tout en lui reprochant de ne pas se mêler des affaires des États !

On l'accuse d'être un charlatant et d'avoir laissé mourir le patient.
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0 #6 Mike Deschamps 03-02-2016 15:12
@Charles Danten

>>c'est peut-être parce qu'il n'y a pas eu d'extermination planifiée des juifs ? Et si la Shoah n'a pas existé, toutes les interprétations sur la complicité de l'église et du pape sont dès lors faussées ou biaisées.

C'est une réponse un peu rapide. Si il n'y a pas eu d'extermination planifiée des juifs, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu meutres de masse que ce soit par des chambres des gaz (détruites par les russes) ou simplement par l'assassinat collectif ou encore par le fait de laisser crever de faim et de maladie les gens dans les camps de concentration. Aujourd'hui il est extremement difficile de dire où est la vérité. Elle se situe probablement quelque part entre toutes ces théories.
Hitler n'était certainement pas plus cruel que les opposants d'en face. Quand on s'indigne pour la cruauté dans les camps de concentration, on doit aussi s'indigner du bombardement délibéré par les américains sur les civils allemands et des attentats à la bombe nucléaire sur des civils japonais. L'indignation ne peut être sélective sinon c'est du 2 poids 2 mesures ou alors il faut tolérer que les allemands et les japonais pleurent leurs morts sans être dans la honte.
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0 #5 Charles Danten 03-02-2016 08:49
Mark Weber de l'Institut pour la révision historique (Institute for Historical Review) aborde le sujet lors d'une conférence sur Hitler. Voici en gros ce qu'il dit :

Hitler était un catholique baptisé et pratiquant jusqu'en 1920, date à laquelle il devint plutôt déiste. Il ne croyait pas en un Dieu, mais plutôt en la providence. Il avait malgré tout un très grand respect pour l'Église catholique. Il ne voulait pas, par exemple, qu'on enlève les crucifix dans les classes.

Pendant la guerre, les églises étaient pleines. Tout le haut gratin hitlérien (90 %) était catholique et allait à l'église.

Les Églises et les religions étaient financées par les impôts des contribuables.

Lorsque l'Église s'est opposée à la politique d'euthanasie des nazis, Hitler y a mis fin sur-le-champ.

Si l'Église et le pape ne se sont pas opposés à l'extermination des juifs, c'est peut-être parce qu'il n'y a pas eu d'extermination planifiée des juifs ? Et si la Shoah n'a pas existé, toutes les interprétations sur la complicité de l'église et du pape sont dès lors faussées ou biaisées.

Rappelons que tous les hommes politiques au pouvoir, Churchill, De Gaulle, Roosevelt, etc. n'en ont jamais parlé au cours de la guerre ou dans leurs écrits. Pourquoi ?

Hitler dans le fond était peut-être bien moins méchant et cruel qu'on voudrait nous le faire croire.

Je ne sais pas quoi en penser moi-même, comme je n'étais pas encore né, je n'ai pas vu de mes yeux vus ce qui s'est passé.
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0 #4 Mariam 02-02-2016 09:24
La photo employée comme support visuel à l'article, et qui représente le Père Maximilien Kolbe, nous rappelle une autre manière d'agir de l'Église (quoique que d'apparence plus passive mais pourtant bel et bien agissante) qui s'analyse dans la vision de la foi chrétienne. Ce qu'il faut re-découvrir c'est que l'Église s'est faite présente physiquement, moralement et spirituellement au milieu de la Seconde guerre mondiale par la présence de ses saints chrétiens, de ses martyrs. Quand on lit la vie du Père Maximilien Kolbe, ou encore Thérèse-Bénédic te de la Croix (Edith Stein) ou Titus Brandsma ( pour ne nommer que ceux-là) on ne peut que constater que l'Église, (en ses membres vivants qui ont rendu témoignage de leur foi par le martyr) a partagé en quelque sort le même sort que ceux qui allaient mourir bêtement. Ses martyrs ont accompagné, consolé, soigné parfois, évité la mort de certains et trouver des mots pour apaiser de nombreuses personnes qui se dirigeaient vers la mort dans une angoisse extrême tout en se faisant prière au milieu d'eux. Malheureusement , la vision du monde s'arrête très souvent à la structure de l'Église mais n'ose pas en pénétrer le cœur qui sont tous ses membres. Oui, l'Église a agit positivement, mais encore faut-il vouloir le voir, il n'y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.
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0 #3 Mike Deschamps 02-02-2016 07:41
@Mariam
Nous recevons énormement de spam dans la partie commentaire. Il se peut que votre commentaire soit passé à la trappe lors de l'éffacement des spams. Si c'est le cas, nous en sommes désolés. Repostez votre message SVP.

Merci
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0 #2 Mariam 01-02-2016 23:02
Moi aussi, j'ai laissé un commentaire ce matin vers 10:00 et il n'est jamais apparu... étrange
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0 #1 Charles Danten 01-02-2016 09:34
Michel Onfrey dans son Traité d'athéologie, aborde cette question avec une certaine confusion en interprétant les événements à la lumière de l'holocauste.
Hitler lui-même dans Mon combat disserte abondamment sur sa relation à l'Église et sur son adoration de Jésus.
Les Allemands étaient loin d'être anti-chrétien, au contraire.
Beaucoup d'opinions contradictoires et fausses sont véhiculés ici et là.
Il est temps de remettre les choses au clair.
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