lundi, 21 decembre 2015 08:01

Une absurdité remarquable

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Martion Dion

De toutes les erreurs commises au nom d’un principe d’égalité perverti, celle du mariage entre personnes de même sexe n’est pas la moindre. C’est le 20 juillet 2005 qu’entrait en vigueur la loi du Parlement du Canada qui légalisait de tels mariages.

Cette loi donnait suite au « renvoi » de 2004, devant la Cour suprême du Canada qui répondait par l’affirmative à la question de savoir si le fait d’accorder aux personnes de même sexe la capacité de se marier était conforme à la Charte canadienne des droits et libertés.

Rappelons brièvement les origines de cette Charte et ses principales conséquences. Les nationaliste canadiens n’ayant jamais respecté l’esprit de la constitution canadienne ni répondu aux revendications légitimes du Québec, ce sont leurs intransigeances et notamment les invasions du gouvernement central (qu’ils contrôlent) dans les pouvoirs du gouvernement québécois qui ont poussé la nation québécoise à se prononcer, pour la première fois en 1980, sur la souveraineté du Québec. Malgré une offre formelle de changement de leur part dans le but de conserver le Québec au sein du Canada, ils ont profité de la réforme constitutionnelle de 1982 pour se donner de nouvelles armes afin de nier la spécificité québécoise, dont le multiculturalisme dans le but de nier le biculturalisme et la notion des deux peuples fondateurs ainsi qu’une Charte de l’individualisme et la responsabilité de son interprétation à des juges nommés par eux (ce qu’on appelle le « gouvernement des juges »). C’est donc dans ce contexte de perfidie mais aussi de démission politique que se sont développés le nivellement individualiste et la fragmentation de la population (individus et multiplicité des groupes et communautés culturelles) ainsi que cette conception dévoyée du droit à l’égalité qui fait en sorte que chaque différence devient une discrimination. Et c’est nourri de la bien-pensance et du discours de victimisation, qui est l’arme de propagande pour contrer toutes les supposées intolérances, que la Cour suprême, depuis quelques décennies, conduit le navire dans cette dérive pathologique d’un droit qui vogue sur les eaux fertiles du laxisme judiciaire.

Et que disent dans leur « renvoi » ces juges perchés dans cet arbre qu’est cette constitution ? Que « notre constitution est un arbre vivant qui, grâce à une interprétation progressiste, s’adapte et répond aux réalités modernes » (par. 22) et, « même si dans un jugement antérieur il est précisé qu’il s’agissait d’un arbre « susceptible de croître et de se développer à l’intérieur de ses limites naturelles » » (par. 26) « l’argument fondé sur les limites naturelles ne saurait être retenu que si ceux qui l’invoquent peuvent préciser quels sont les éléments objectifs essentiels de la définition « naturelle » du mariage. À défaut, cet argument se résume à une tautologie » (par. 27). Évidemment, sans analyse des arguments soumis, elle précise être « en présence d’avis contraires sur les limites naturelles du mariage » (par. 27) qu’« il n’appartient par à la Cour de fixer, dans l’abstrait, les limites naturelles du mariage » (par. 28) et que « les vues opposées qui nous sont soumises ne nous permettent pas de conclure que le mot « mariage » » (…), « interprété de façon libérale, exclut le mariage entre deux personnes du même sexe » (par. 29). Et voilà la profondeur de l’analyse de ces augustes juges, le reste n’étant qu’arguties juridiques et application d’un droit à l’égalité centré sur la personne ou un groupe de personnes et « la simple reconnaissance du droit à l’égalité d’un groupe ne peut en soi, porter atteinte aux droits d’un autre groupe » (par. 46).

La cour a donc refusé l’analyse des arguments soumis et, en présence d’« avis contraires » et de « vues opposées », elle préfère ne pas se prononcer sur « les limites naturelles du mariage » et se contente d’affirmer que, « grâce à une interprétation progressiste », l’« arbre vivant s’adapte et répond aux réalités modernes ». On voit les limites d’une consultation devant une Cour désemparée en présence d’avis contraires et de vues opposées. Faut-il rappeler que des parties se présentent devant un tribunal pour faire trancher une question du fait justement qu’ils ont des avis contraires ou des vues opposées. Ici, la Cour suprême avait le devoir d’analyser les arguments reçus d’une manière sérieuse et objective et elle ne l’a pas fait… mais c’est sans doute, pour reprendre ses propres mots, une « tautologie » que d’affirmer une telle évidence.

Soulignons ici d’autres évidences : (1) il faut un équilibre entre les droits collectifs et les droits individuels ; (2) la liberté de choisir et l’autonomie personnelle ne sont pas affectées par une définition du mariage ne constituant pas une interdiction d’une orientation sexuelle ; (3) cette définition est une reconnaissance de la possibilité naturelle de procréation du couple et la famille est fondamentalement l’entreprise d’un homme et d’une femme ; (4) il y a des vérités et des normes qui existent au-dessus des phénomènes d’époque et le droit au mariage doit s’interpréter dans le cadre du remplacement des générations et non sur la base d’une vision réductrice d’un droit à l’égalité centré uniquement sur l’individu ; (5) et finalement, le mariage n’est pas une conception particulière de la moralité apparue avec les religions monothéistes mais une conception préexistante qui origine de la nature des choses et du sens commun.

La question reste ouverte et le problème entier. Faut-il affaiblir et dénaturer nos institutions sociales, briser les repères essentiels et appliquer une approche aussi dévoyée du droit à l’égalité ? Le mariage est une institution sociale, une institution publique, qui dépasse les individus et, comme l’affirmait dans une entrevue l’ex-juge en chef de la Cour suprême, Antonio Lamer, « il ne faut pas s’énerver parce qu’on a reconnu aux homosexuels le droit à certains avantages sociaux. Cela ne veut pas dire (...) qu’on soit d’accord avec le droit de se marier, d’adopter des enfants. Il ne faut pas commencer à démantibuler les institutions sociales » (Les Affaires, 15 déc. 2001).

Il n’y a pas de discrimination à traiter des réalités différentes de manière différente. L’égalité – soit la dignité – est celle qui découle du fait de l’être humain et le droit à l’égalité est lié à la dignité que chaque être humain possède quelle que soit sa condition. Mais le respect de chacun ne doit pas être une interdiction de tenir compte des différences. Vouloir tout niveler c’est nier les différences qui font la richesse de l’ensemble et c’est détruire des repères indispensables et affaiblir les institutions sociales. La recherche de l’égalité ne consiste pas à avoir tous les droits mais à faire accepter sa condition et sa différence dans le respect de l’ordre naturel des choses et de ses institutions. Des normes (tant civiles que religieuses) fondées sur la loi naturelle sont valables et celles relatives au mariage – qui réfère au couple et la complémentarité entre l’homme et la femme – n’est valide que si elle reflète la différence et la dualité des sexes.

Notons aussi que la mécanique juridique déficiente de la Cour suprême peut éventuellement ouvrir la porte à une reconnaissance de la polygamie au Canada. Déjà en janvier 2006, une étude menée pour le compte du ministère de la Justice canadien en recommandait la décriminalisation. Cette étude qui devait fournir des munitions pour défendre le mariage gai a plutôt démontré qu’il n’y a pas de limite à l’égarement et que l’approche développée par la Cour ouvre la porte à n’importe quoi. Exemple : des adultes consentants pratiquent la polygamie et la considèrent comme un droit et un élément important de la religion qu’ils pratiquent avec une croyance sincère. Face à cette situation, la Cour applique sa mécanique juridique et elle n’a pas à vérifier si c’est un élément de cette religion car une « croyance sincère » suffit (principe qu’elle a développée dans une autre cause). D’autre part, comme elle écrit dans sa décision sur le mariage gai, « la protection de la liberté offerte par l’al. 2a) de la Charte a une portée étendue et la jurisprudence de notre Cour sur la Charte la défend jalousement » (par. 53). De plus, « la société canadienne est une société pluraliste » (par. 22) et « le droit de liberté de religion consacré à l’al. 2a) de la Charte englobe le droit de croire ce que l’on veut en matière religieuse » (par. 57). Ainsi, si on applique ses propos du paragraphe 56 à des autorités religieuses qui célèbrent des mariages polygames en accord avec leurs croyances, « si une loi leur imposant cette contrainte était promulguée [soit ici une interdiction de le faire], nous concluons qu’elle serait presque assurément contraire à la liberté de religion garantie par la Charte, compte tenu de la protection étendue accordée à la liberté de religion par l’al. 2a) de la charte » (par. 56).

Et dire qu’en novembre 2014, le ministre de l’immigration du Canada, Chris Alexander, a présenté un projet de loi pour interdire l’immigration au Canada à ceux qui ont contracté des mariages polygames ou forcés. S’il soutient que ces pratiques sont « contraires aux valeurs canadiennes », il ajoute qu’il y a « probablement des milliers » de cas d’immigrants polygames au Canada. Ainsi, on trouvera bien un jour au Canada des polygames (hommes si possible et leurs femmes) pour démontrer une croyance sincère en cet élément de leur religion et défendre cette dernière et leur droit en vertu des principes de la Charte et de la mécanique juridique qui en découle.

En conclusion, on ne peut que constater le mutisme qui afflige nos intellectuels et dirigeants politiques sur les questions cruciales et, avec le mariage gai, on voit le résultat néfaste de cette abdication au profit de juges hauts perchés dans cet « arbre vivant » qu’est cette constitution. Ils ont la prétention de voir loin mais ils sont aveuglés par leur mécanique juridique et plusieurs citoyens, qui ont les pieds bien ancrés dans la réalité, sont en désaccord avec leurs décisions. L’individu ne peut être la mesure de tout car ses désirs illimités conduisent à la débâcle de la société. D’autre part, on peut constater que l’effritement de la pensée s’est transformé en recherche de tous les subterfuges pour justifier, même contre la raison, des égarements évidents et ce sont les accusations de « …phobies », l’angélisme et l’idéologie compassionnelle qui paralysent l’action collective.

Le présent texte est un modeste appel au réveil, à la lucidité et à la défense de la raison sans redouter les accusations de la police de la pensée du politiquement correct.

Source : vigile.net

Commentaires   

 
0 #1 Charles Danten 22-12-2015 09:44
Pourquoi pas, tant qu'à faire, légaliser le marriage inter-espèce et la zoophilie ? Dans cette logique, un homme peut très bien tomber sincèrement amoureux de sa chienne au point de vouloir la marier et lui léguer sa fortune; un père peut vouloir marier sa fille, ou un frère sa sœur, etc. etc.
Toutes les dérives sont possibles, au nom du progrès, des droits de l'homme et de la compassion.
Noblesse oblige!
Où placer les limites et qui en décidera ?
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