Photo Pinsonneault : Maurice Duplessis et ses soeurs, Margueritte, Jeanne, Etiennette, et Gabrielle
Juriste Curé
Du corporatisme à l’affairisme des syndicats catholiques
Le changement d’organisation au sein des syndicats prend son origine d’une « ferveur corporatiste [qui], à la confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC) comme chez beaucoup d’intellectuels catholiques, commence à battre de l’aile pour être largement discréditée après la Seconde Guerre mondiale. Le corporatisme est trop associé aux régimes fascistes qui se sont servis de la corporation en Europe pour dissoudre les syndicats libres, y inclut les syndicats chrétiens ou catholiques. […] Ces dirigeants ne font pratiquement plus allusion au corporatisme après la guerre, préférant lui substituer l’expression «organisation professionnelle» ou en traiter comme un jalon vers la «démocratie industrielle»[…] Le projet émane directement de l’idée de réforme de l’entreprise, projet mis de l’avant par un groupe de jeunes clercs catholiques, et qui est reprise par des syndicats affiliés à la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC) » [Jacques Rouillard, La grève de l’amiante de 1949 et le projet de réforme de l’entreprise, 2000]. Ce chambardement dans la structure du syndicalisme catholique cache un autre conflit idéologique. Ces "jeunes clercs" dont parlent Rouillard sont principalement dominicains, réformateurs et militants forcenés, voire opiniâtres, inspirés par les idées françaises plutôt que romaines, en opposition aux jésuites plus conservateurs et traditionalistes [i] mais tout de même libéraux. Aujourd'hui, nous dirions, la gauche contre la droite... révolutionnaire contre réactionnaire.
Cette gauche opiniâtre, souvent dominicaine prend le point de vu assez similaire à ce que l'évêque de Chicoutimi, Mgr Melançon a exprimé en 1948 : "les sociologues et les économistes [!] constatent que le simple régime de salariat n’entretient pas assez chez l’ouvrier le souci du travail compétent et honnête [!], ne cultive pas une équitable distribution des profits de l’entreprise. Le Capital et le Travail trouveront grand avantage à faire évoluer leurs relations dans le sens de l’association, c’est-à-dire vers une participation plus effective des travailleurs à la vie de l’entreprise, à sa gestion et aux profits qui en résultent ».[Jacques Rouillard, p. 34, 2000]. Autrement dit, le problème ne vient pas de l’entrepreneur endetté qui exige plus de travail parce qu’il doit augmenter son profit afin de rembourser les intérêts de son emprunt aux créanciers, non, le problème c’est que les travailleurs ne participent pas assez à l’organisation de leur propre travail. Bien sûr, les employés vont exiger d’eux-mêmes de travailler comme des esclaves ! De cette incompréhension viennent tous les problèmes de négociations. L’employé a raison, le genre de travail qu’il accomplit n’a rien d’humain. Or, l’employeur aussi a raison ; il en exige toujours plus, puisqu’il doit rentabiliser son investissement pour ainsi rembourser son prêt et parfois même satisfaire les actionnaires. Et s’il ne rembourse pas son prêt ou ne satisfait pas les actionnaires, tout son monde s’écroule. Aucune entente n’est possible. Certaines petites crapules en profiteront pour se faire une réputation en prenant la part des travailleurs, vous verrez.
[i] http://www.erudit.org/revue/mensaf/2004/v5/n1/1024388ar.pdf p16 « C'est donc la France qui servira de modèle aux intellectuels catholiques québécois ainsi qu'à de nombreux clercs ayant étudié dans ses universités. L'Université catholique de Louvain, en Belgique, fut également un lieu d'étude pour nombre d'entre eux. » Et page 9 pour la description des deux antagonistes.
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