Pardonne-moi de malmener ta langue, je ne l’ai point utilisée depuis belle lurette. Il te faudra redoubler d’effort pour me comprendre ; mais comme on vit sur le même territoire, il a bien fallu que je trouve un moyen pour qu’on se comprenne. Aussi ai-je tenté de la simplifier sans, je l’espère, l’avoir dénaturée ou avoir adopté un ton qui t’infantilise.
Toé : Canadien-français
Moé : Québécois
Toé démodé, mais rien à perdre donc encore capable d’insoumission
Moé J’chus en vogue, mais plus pour longtemps et à plat ventre agrafé au sol à servir de tapis aux institutions étrangères.
Toé té un peu sauvage et illettré, mais tu sais écrire et compter mieux que moi. C’est tout ce qui compte. T’es capable de survivre par toi-même s’il le faut.
Moé j’areviens la queue entre les deux jambes de ma tentative d’émancipation nationale.
Toé té dépossédé par l’état et l’industrie
Moé j’chus allié malgré moi de l’État et de l’industrie
Toé tu possédais ton lopin de terre
Moé j’chus dans un 1 ½, toute décrisse.
Moé j’ai un diplôme
Toé, pour t’humilier, les universités n’ont pas eu besoin de te diplômer, ils ont formé des sexy-robots dans mon genre juste bon à lever le nez sur tes manières.
Moé, j’chus effoiré par le rouleau compresseur de l’individualisme, pu rien à faire avec moé, juste trop marqué, devenu pu humain pantoute.
Toé té physiquement plus magané que moé mais l’individualisme t’es pas encore passé dessus, y te cours toujours après. Y a encore de l’espoir. Tu sais ce qu’on dit, tant qu’y a de l’espoir, y a de la vie.
J’sais, t’avais mendié mes conseils, mais torieu mes réponses ne valaient pas de la marde. J’tavais dit : « arrive en ville mon toé ! Modernise-toé ! Fais-toé aller le ciboulot mon toé ! Qu’est-ce tu veux ? (soupir)… j’tais naïf. Depuis, y a bien fallu que je m’adapte, que je m'conforme, que je devienne froid et sur mes gardes comme tout le monde, que je devienne crétin comme tout le monde…
Comment gagner sa vie en continuant à vivre comme toé ? T’imagines si j’avais fait ma tête dure. J’serais resté seul dans mon coin.
Comme tu te l’es sûrement fait dire toute ta vie par monsieur le curé, en ville tout le monde veut ta peau. Mais généralement c’est plus tes poches qui se vident.
Faque, seul bon conseil que je peux te donner, c’est de jamais arsoude en ville ! Abrutis-toé pas avec l’école « moderne », pis scores-en une de par chez vous, parce que par chez nous ça pète plus haut que leur trou.
À la revoyure mon toé »
Suite si Dieu le veut…
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